S’asseoir était donc une bonne suggestion mais il restait à savoir où. Evelynn avait suggéré l’idée sans vraiment y réfléchir et maintenant que Garfield avait agréé, elle s’en tenait à sa décision d’où s’asseoir. Elle le fixa – toujours perdue alors qu’il regardait les alentours – ils resteraient donc dans les alentours. Peut-être que Garfield préférait rester dans le calme – à vrai dire, Evelynn aimait bien rester dans les tunnels. Ca leur donnait une certaine intimité. Personne ne viendrait les chercher et les déranger ici. Il avait l’air d’avoir trouvé l’endroit. Evelynn pencha légèrement la tête pour voir – un creux dans le mur. Il commença à faire quelques pas et s’arrêta.

« Hmm … ? »

Elle remarqua un changement de couleur chez Garfield. Hein ? Et puis lorsqu’il recommença à marcher. Elle remarqua qu’ils se tenaient toujours la main – attirée par lui. Elle avait complètement oublié. Ses joues rougies qui commençaient à peine à perdre leur couleur revinrent furieusement au rouge.

Elle s’assit à coté de lui – sans rien dire. Le muret était un peu haut pour elle, elle ne touchait plus le sol et si elle devait descendre, elle devait faire un petit saut – de quoi se demander comment elle avait réussit à le monter aussi facilement. Elle avait les yeux baissés – son regard passant de ses jambes à leurs mains jointes entre eux deux. Ses joues (et ses oreilles) ne voulaient pas reprendre leurs couleurs naturelles. Evelynn entendait son propre battement cœur – rapide, très rapide. Elle était extrêmement consciente de la présence de Garfield – peut-être trop. Le silence entre eux rendait les choses encore plus lourdes. Est-ce qu’elle devait dire quelque chose ou est-ce qu’elle ne devait rien dire ? … Ce fut Garfield qui parla en premier.

Elle sursauta légèrement – relevant son regard vers Garfield. Qu’elle se sente mieux ? Est-ce qu’il avait vu qu’elle avait ses joues rouges ou que son cœur battait tellement vite ? Elle fut un peu prise au dépourvu.

« Ah ! Euuh… Je ? »

Elle ne savait pas quoi répondre. Elle avait honte de perdre autant ses moyens parce qu’elle tenait la main de Garfield, parce qu’elle était seule avec lui et peut-être aussi parce qu’elle était devenu un garçon.

« Désolée… »

Elle rabaissa son regard.

« Je veux bien mais … je sais pas vraiment comment en fait… »

Elle ramena sa main libre vers sa bouche – se cachant légèrement. Elle ne savait pas vraiment ce qu’elle avait donc elle ne savait pas vraiment ce qu’il pouvait faire… Elle ne savait pas vraiment qu’est ce qu’elle doit dire de plus.

Le moins qu'on puisse dire, c'était que l'affaire n'était pas gagnée. Garfield se demandait vaguement si les choses auraient été plus faciles s'il n'y avait pas eu cette pluie bizarre qui avait un peu changé la donne, et quelque chose lui faisait dire que probablement pas.

Ce n'était vraiment pas évident, parce qu'il n'était pas particulièrement doué à la base pour faire la conversation, et si en plus la personne avec qui il essayait de parler se sentait mal, c'était encore pire. Elle avait l'air tellement mal... Il espérait vraiment qu'elle n'allait pas se mettre à pleurer parce que, même si elle avait l'air d'un garçon, rien que l'idée le paniquait légèrement. ... D'accord, un peu plus que légèrement.

Elle disait à peine quelques mots, mais avouait au moins sincèrement qu'elle ne savait pas ce qu'il pouvait faire pour l'aider à se calmer, et il ne savait pas si c'était bien qu'elle soit honnête ou complètement désespérant parce qu'il était inutile – comme d'habitude, dirons les mauvaises langues.

Cependant, il y avait un truc qui marchait généralement bien, s'il voulait relancer la discussion. Raconter des bêtises, c'était toujours le plan de secours, même si, quand il enclenchait le mode automatique, il disait vraiment n'importe quoi. Mais bon.

« T'imagines si toutes les fées qui sont là sont des copines à Meme ? »

Il regardait le plafond avec intérêt, les joues un peu rouge.

« C'est vachement joli, mais j'espère qu'elles sont moins, euh. » Si ça se trouvait, les fées écoutaient, alors il ne fallait pas dire de connerie sur le coup. « Affectueuses. Parce que. Tu vois toute la nuée sur le terrain de Quidditch pendant un match ? »

Déjà que l'autre machin à ailes avait la sale habitude de se prendre pour un vif d'or. Garfield était certain qu'un jour quelqu'un aurait l'idée stupide de lui offrir une robe dorée, et que ce serait la fin des attrapeurs de Poudlard.

« Enfin ce serait joli. Mais faudrait un match de nuit. », ajouta-t-il d'un air pensif. Il changea de sujet sans préambule. « Tu sais ce que tu vas faire de tes vacances ? Je sais même pas où tu habites en fait. Moi je fais un trajet ridicule. On est en Écosse, j'habite pas très loin, et je dois quand même passer par Londres avec le train, c'est un peu débile. »

Il allait rentrer avec sa soeur, et Pan probablement, vu que les parents s'entendaient bien et que la destination était similaire. Cette année, ils revenaient à trois, et en septembre, ils repartiraient à deux ; ça allait être très étrange. Mais, quelque part, sans doute vachement moins tendu pendant les vacances.

« 'Fin au moins y a des chocogrenouilles, dans le train. »

Il essayait de faire comme s'il n'y avait pas de problème, et il disait à voix haute tout ce qui lui passait par la tête, en regardant les lumières mouvantes. Il passa une main dans ses cheveux, oubliant encore qu'ils étaient (beaucoup trop) longs, et ses doigts s'emmêlèrent, se coinçant dans les mèches ; il n'avait même pas remarqué qu'il portait une bague, dont la décoration avait visiblement décidé de faire des noeuds.

« Oh crotte de. »

Éclatant d'un rire nerveux, il s'appliqua à défaire le noeud... Sans vraiment y arriver, en fait.

Garfield – il n’avait pas l’air de lui en vouloir de ne pas savoir. De ne pas comprendre ce qu’il lui arrivait. Quelques secondes et rien ne se passait. Le cas d’Evelynn n’avait pas l’air de régler les choses. Elle releva la tête légèrement et inspira quelques bouffés d’air avec de détourner le regard vers la direction opposée à Garfield. Puis, il parla et elle dirigea son regard vers lui. Il regardait les lumières – les fées qui étaient au plafond, elle suivit son regard. Evelynn l’écoutait attentivement.

Elle imaginait bien ce qu’il disait. Un match de nuit éclairé par une bonne partie des fées qu’on aurait pu trouver dans les environs de Poudlard – parce qu’il en fallait quand même beaucoup pour recouvrir tout le terrain. Mais n’était-ce pas dangereux ? La nuit, la vision est basse et les cognards volent toujours aussi vite, faisant toujours autant de dégâts qu’ils le feraient en journée – ensuite les différents joueurs pouvaient rentrer dans les fées qui éclairent le terrain, se retrouvant avec un petit être féerique sur sa visière et quand on a les deux bras occupés, on ne peut pas le déloger.

Evelynn n’eut pas le temps de répondre. Garfield était déjà passé à un autre sujet. Il parlait vite – Evelynn ne comprenait qu’une (grande quand même) partie de ce qu’il disait. Il habite en Ecosse. Et il rentre avec qui ? Evelynn ne savait même plus s’il l’avait dit ou pas. Puis il passe par Londres – et c’est là qu’Evelynn habite. Mais il faisait un détour, non ? Il allait vers… le sud-est alors qu’il habitait au … nord (?) Evelynn n’était pas un génie en géographie mais dans sa tête, ça donnait ça.

Garfield avait réussi à détendre l’atmosphère et à calmer le cœur battant d’Evelynn. Elle commençait à reprendre ses couleurs. Elle regardait toujours le plafond – enfin, les fées qui bougeaient très lentement. Il avait fini de parler en abordant les chocogrenouilles – Evelynn aimait bien ces friandises, quoique le fait qu’elles pouvaient faire un bond était assez dérangeant.

« Hmm…. J’habite à Londres avec mes – »

Elle voulait lui répondre, mais il l’a coupa. Elle se retourna vers lui pour vérifier ce qu’il lui arrivait. Il rigolait bizarrement et Evelynn remarqua qu’il avait une position bizarre. Sa main était coincée dans ses cheveux. Evelynn laissa échapper un petit rire pour se cacher la bouche avec sa main libre. C’était vraiment quelque chose que ne pouvait arriver qu’à Garfield.

« Je peux t’aider ? »

Elle avait un sourire sur les lèvres et faisait de son mieux pour ne pas trop
rigoler.  Elle lâcha la main de Garfield et s’approcha de lui mais elle n’avait pas vraiment une bonne place pour l’aider. Forcément c’était la main qui lui était opposée qui était coincé dans ses cheveux.

« Est-ce que tu peux légèrement  te tourner ? »

Elle posa ses deux mains sur son dos pour le pousser dans la direction qu’elle voulait et le lui indiquer. Elle avait complètement oublié son gêne d’il n’y a même pas une minute. Elle essaya de ne pas s’approcher de trop mais comme le tunnel n’était pas très éclairé, elle ne pouvait pas faire grand-chose d’autres pour voir la bague qui s’était emmêlé. Elle commença à démêler les cheveux de la bague.

« Dis-moi si ça fait mal. »

Elle essayait de ne pas faire mal mais il fallait quand même un peu tirer et en plus, Evelynn quand ça lui arrivait, elle finissait toujours s’arracher des cheveux – elle voulait éviter de faire ça à Garfield.

Mentalement, Garfield se traitait de débile de toutes les manières possibles et imaginables. Mais bon, il s'était retenu de jurer juste à temps, il n'allait pas s'y remettre. C'était affreusement curieux comme le fait d'être une fille lui faisait réfléchir à deux fois avant de parler comme un charretier ; il se demandait si ce n'était pas un peu sexiste dans le fond, mais il faisait encore plus gaffe que d'habitude.

« Euh ouais, je veux bien un coup de main... »

C'était un réflexe bien naturel que d'essayer de tirer sur le noeud, mais ça faisait mal. Il nota pour lui-même de ne jamais, jamais se laisser pousser les cheveux, quoique l'idée ne lui serait probablement jamais passé par la tête en temps normal, il était bien trop incertain de ses propres goûts pour même songer à un changement d'apparence, quel qu'il soit, ce qui faisait parfois un peu soupirer sa maman quand elle essayait vaguement de lui faire mettre autre chose que des t-shirts pourris et des jeans élimés.

Il se tourna pour qu'Evelynn aie accès au problème, hochant la tête pour répondre à la question, ce qui lui rappela que hocher la tête n'était pas une bonne idée. Il était dos à elle, les genoux ramenés contre son buste pour être mieux installé. C'était vachement dangereux d'être une fille, en fait ; il y avait toutes sortes de trucs et de machins qui compliquaient considérablement la condition humaine qui, selon Garfield, était déjà assez compliquée comme ça.

« Je crois que j'arriverais pas à survivre comme ça. Vivement que ce machin passe. Je sais pas comment vous faites. »

Ronchonnant entre ses dents, il pencha la tête en arrière pour donner plus d'amplitude de mouvement à la jeune fille, exposant sans doute son expression grognon. Son équilibre était un peu instable, comme ça, mais bon, si c'était plus facile... Il put bientôt faire glisser son doigt hors de la bague. Le bijou en lui-même restait coincé, mais au moins, il n'avait plus le bras en l'air comme une andouille.

« Tu en sors ? Je suis désolé. »

S'excuser d'être une quiche ne servait pas à grand chose, mais il le faisait souvent, comme si ça changeait quelque chose. Il était bizarrement attentif au moindre mouvement, constatant qu'Evelynn faisait attention, même s'il ne put s'empêcher de souffler comme un chat à un ou deux moments où, par mégarde, il fallut tirer sur une mèche. Il ne lui semblait pas qu'habituellement, les cheveux étaient des trucs aussi sensibles. C'était peut-être dû à la longueur. En vérité... Hors des manoeuvres brusques pour décoincer l'objet, il se serait presque surpris à ronronner, alors que la situation était vachement bizarre. Qu'est-ce que c'était encore que ça pour une forme tordue de sorcellerie ?

Évidemment, qui dit équilibre et Garfield dans la même phrase se doit d'y placer une négation au bout d'un moment, être penché comme ça en arrière ne pouvait pas durer, surtout s'il était perturbé. Il fut surpris par une énième traction un peu plus brusque, et perdit ce fameux équilibre, pour atterrir la tête sur les genoux d'Evelynn. Et la regarder comme un poisson (vachement rouge) hors de l'eau pendant quelques secondes.

« MERDE. Enfin. Euh. Pardon. Je. »

Oups. En plus ça résonnait, dans les couloirs de la Chambre des Secrets. Bravo Fifi, toujours subtil.

Garfield se retourna sans broncher – ramenant ses jambes contre son buste. Evelynn était concentrée sur la boule de cheveux qui avaient empirés parce que Garfield avait étrangement réussit à le faire, elle écoutait à moitié ce qu’il disait.  Difficile d’être une fille ? Evelynn ne savait pas trop, c’était normal pour elle mais il avait raison sur certains points, avec des cheveux courts, c’est vrai qu’on ne peut pas vraiment les coincés avec une bague, c’était forcément moins gênant.

Garfield se pencha vers l’avant facilitant la tâche pour Evelynn. Elle avait réussit à réduire la taille du nœud, c’était déjà pas mal et Garfield pouvait maintenant enlever sa main de la bague. Mais la bague ne voulait pas se détacher – comme si elle aimait beaucoup les nouveaux cheveux de Garfield.

« Je fais de mon mieux… Oh, ne t’excuse pas, ça arrive. »

Elle s’arrêta deux secondes pour lui adresser un sourire et puis elle continua ce qu’elle faisait – sortant petit cheveux par petit cheveux du nœud. Maintenant, elle devait tirer sur une plus grosse mèche qui étrangement s’était emmêlé avec des cheveux en dehors de ceux qui s’étaient coincés dans la bague pour ensuite se re-mêler avec la bague. C’était bizarre… Evelynn regarda le problème pendant quelques secondes sans rien faire avant d’opter pour essayer de tirer les cheveux qui n’étaient pas censé être là en dehors du nœud.

Puis elle avait tiré sur la mèche et c’était devenu une sorte de catastrophe ingérable. Garfield était tombé sur ses genoux et elle ne savait plus quoi faire. Elle avait lâché ses cheveux et les mains d’Evelynn étaient immobiles au dessus du visage de Garfield – laissant quand même le visage de Garfield directement face à celui d’Evelynn. Elle le regardait et comme lui, elle devenait pire que rouge.

« … »

Elle avait arrêté de respirer dans le processus. Elle ne savait plus quoi faire, ni quoi dire. Elle était là à le regarder. Son cœur battait extrêmement vite et sa température avait augmenté considérablement en à peine quelques instants. Puis elle remarqua qu’elle devenait rouge également parce qu’elle avait retenue sa respiration pendant un long moment – elle débloqua et détourna son regard vers le coté.

« Désolée… J’ai du tirer trop fort… »

Elle ne savait pas trop quoi faire de ses mains, pour le moment elle les avait laissé là juste au dessus du visage de Garfield mais elle n’avait pas l’air bien là – elle pouvait les mettre dans son dos, mais ça allait paraitre pas très naturel, elle pouvait les mettre dans ses poches mais ça nous plus ce n’était pas le top. Elle décida de simplement les rapprocher d’elle – de les coller à sa poitrine.

Ce n’était même pas passé dans la tête d’Evelynn qu’elle pouvait aider Garfield à se relever et donc, elle était là à regarder sur le coté en mordillant la lèvre inférieur. En espérant que le sentiment de gêne passe vite.

La situation était de plus en plus étrange, voire empreinte d'un certain malaise. Évidemment, pour ne rien arranger, Garfield n'avait pas le réflexe immédiat de se redresser, ç'aurait été trop beau. Il la regardait juste bêtement. Un garçon penché au dessus de lui, qui avait malgré tout vachement l'air d'une fille. Probablement que c'était pareil dans l'autre sens, et que la délicatesse innée du Poufsouffle ne trompait personne plus de deux secondes quant à son identité habituelle, mais de son point de vue, c'était vraiment étrange. C'était un peu comme essayer de trouver une personne connue derrière un déguisement très bien fait.

C'était tout à fait le moment et la position pour les réflexions philosophiques, bien entendu. Il sembla se réveiller après une seconde.

« Non non, c'est pas toi, c'est juste moi qui... »

Il parlait avec empressement, débloquant une fonction cérébrale à la fois. D'abord parler, ensuite bouger. Le seul problème c'est que, quand il se décida, c'était dans un mouvement de panique soudaine, parce qu'il se rendait compte que ce n'était absolument pas correct, et qu'il aurait dû dégager depuis un petit moment déjà. C'était plutôt curieux comme il avait de bons réflexes au Quidditch mais que, dés qu'il fallait réagir dans une situation où il avait l'atroce sensation d'avoir fait une connerie, il se paralysait complètement jusqu'à tout faire dans le désordre, comme un bouchon de champagne qui saute.

D'ailleurs, il se redressa trop brusquement, ce qui résulta en une collision imprévue entre son front et celui de sa cavalière, ce qui le fit retomber aussi sec.

« OW ! »

Pendant une seconde, il regarda Evelynn comme s'il était un lapin pris dans les phares d'une voiture, complètement horrifié de son propre comportement, et un peu sonné, une main sur le front. Il ne s'étaient pas cogné fort, c'était plus de la surprise qu'autre chose, mais il fallait bien avouer que Garfield faisait particulièrement n'importe quoi sur le coup.

« ...... »

Et puis, inexplicablement, comme si un noeud de stress venait subitement de se dénouer dans son ventre, il explosa de rire. Un rire trop cristallin, trop chantant, qui ne lui appartenait pas vraiment, mais c'était libérateur, notamment de cet étrange malaise. Enfin, de son côté du moins.

« Désolé... Pfrrrt. »

C'était sans doute le fou rire le plus stupide, le plus mal placé qu'il avait jamais eu, mais ça ne voulait pas s'arrêter. Ce qui était probablement encore pire. Il était désolé d'être ridicule, de rire – dans le contexte, ça valait bien des excuses -, de cette bague qu'il avait toujours coincée dans ses cheveux, pour le fait d'être une fille, même si c'était pas de sa faute. Et l'absurdité de tout ça provoquait ce rire, en grande partie nerveux.

Sa respiration finit néanmoins par se calmer, et il essuya une larme de rire sous ses lunettes. Il se sentait mieux.

« Je t'ai pas fait mal ? »

Avec tout ça, il s'était pété le fou rire du siècle, mais il n'avait toujours pas bougé. Ceci dit, il ne semblait plus s'en soucier ; il souriait largement.

Une réponse suivit d’un mouvement brusque. Elle ne s’y attendait pas et d’un coup, une fraction de seconde – collision frontal. Par réflexe, Evelynn se frotta le front, essayant d’adoucir la douleur – la collision n’avait pas été si violente en fait, donc elle se frottait le front un peu pour rien. Puis elle s’arrêta parce que bizarrement, venu de nulle part, Garfield rigolait. Evelynn le regarda sur ses genoux avec de grands yeux. Que lui arrivait-il ? Est-ce qu’Evelynn avait quelque chose sur le visage ? Elle se frotta le visage avec la main qui frottait son front il n’y a même pas quelques instants mais ça n’avait pas l’air d’être ça. Garfield continua à rire puis elle comprit – enfin, elle réalisa que ce n’était pas d’elle qu’il rigolait. Un grand sourire se dessina sur son visage et puis un petit rire s’échappa. Cette fois, elle se moquait peut-être un peu de lui – mais gentiment, bien sûr. Garfield avait quand même choisi le meilleur moment pour avoir un fou rire.

Puis il arriva à se calmer, il avait même fini par lâcher une larme. Une question simple, Evelynn ne prit même pas quelques secondes pour lui répondre.

« Oh non ! Pas du tout ! C’était plus surprenant que douloureux ! »

Evelynn avait un grand sourire, même que ses yeux étaient presque fermés comme les asiatiques. Ça lui faisait plaisir que la situation gênante avait tourné ainsi, l’atmosphère s’était largement adoucit. Elle regarda plus attentivement Garfield qui était toujours sur ses genoux – mais à l’instant, ça lui semblait tout à fait normal – puis, quelque chose attira son attention, quelque chose qui reflétait de la lumière dans ses yeux. Oh ! C’était la bague qui était toujours attaché aux cheveux de Garfield. C’est vrai qu’elle n’avait pas encore réussit à l’enlever.

« Attends. Ne bouge pas. »

Elle prit le bout de cheveux encore emmêlé avec la bague, il ne restait plus que des petits nœuds facile à démêler – une ou deux minutes après, la bague était libre, enfin, Garfield l’était.

« Voilà ! »

Elle lui montra la bague et le regarda à travers l’anneau, son sourire toujours présent.

« Je te la rends ou tu la remettra jamais ? »

Elle laissa un rire s’échapper. C’est vrai qu’elle n’avait pas apporté que des bonnes choses, cette bague, mais au moins, elle avait réussit à créer quelques souvenirs entre les deux sorciers. Et forcément, Evelynn allait s’en souvenir et peut-être que Garfield aussi?

A présent qu'il avait arrêté de se marrer comme une baleine, à l'exception d'un ou deux gloussements qu'il réussit à réprimer pour ne pas avoir l'air trop bête, Garfield ne savait pas trop quoi faire. Au moins, il était content que sa maladresse n'ait pas fait mal à Evelynn, c'était déjà ça de pris ; il restait à faire face au ridicule de la situation.

Il se demanda un peu ce que la Serdaigle lui voulait, lorsqu'elle lui intima de ne pas bouger, mais il obtempéra, avant de comprendre quand elle se remit à chipoter dans ses cheveux. Au moins, il avait une excuse pour ne pas bouger, évitant ainsi une catastrophe – une deuxième. Il regarda le plafond avec application pendant qu'Evelynn faisait Merlin seul savait quoi dans les longues mèches sombres dont il avait hérité avec cette saleté de potion. Il se demandait vaguement si toutes les fées qui voletaient sous la voûte étaient à présent des mâles, en voyant des gouttes filtrer encore entre les pierres mal scellées ; il décida que la question n'avait pas d'importance dés qu'il eut autre chose à regarder.

C'était un joli bijou, du moins il le supposait, puisqu'il n'y connaissait pas grand chose, n'ayant jamais de sa vie porté pareil accessoire.

« Merci ! »

La question le prit un peu au dépourvu.

Il hésita une seconde, puis se redressa en prenant bien attention cette fois, même s'il parla en même temps. C'était tout de même moins perturbant d'être simplement assis à côté d'Evelynn ; il se retourna pour être face à elle, les genoux ramenés contre le buste. Il était bien content d'avoir une robe plutôt longue, il pouvait s'asseoir n'importe comment. Il se demanda si son lui féminin avait juste un certain sens de la théâtralité, ou si elle avait vraiment considéré cet aspect pratique. Il ne le saurait jamais.

« Euh. Tu peux la garder, si tu veux. C'est... pas trop mon genre, d'habitude. »

Il rit un peu, sans doute plus nerveusement qu'elle. L'idée lui traversa l'esprit que l'objet disparaîtrait peut-être quand ils reprendraient leur apparence normale. Ou alors...

« Tu crois que quand on va redevenir normaux, nos fringues aussi ? »

Non parce que si c'était pas le cas, il n'allait pas tellement apprécier. Il y avait le fait qu'il n'avait qu'une seule paire de chaussures, et qu'elles étaient gentiment par terre à côté d'eux parce qu'elles avaient gagné plusieurs centimètres de hauteur, et il y avait la tenue. Il avait beau faire comme s'il s'y adaptait très bien, et y trouver des avantages, ça restait une robe. Et une robe sans manches, en plus. Rien que d'y penser, il remonta le bustier d'un geste pas très gracieux, en se dandinant un peu, avant de se rendre compte que ce n'était pas le geste le plus classe du monde.

« Hem. Enfin. Euh. Bref, tu la gardes, c'est bien. »

Garfield serra plus étroitement ses jambes repliées contre lui, posant son menton sur ses genoux.

« Je sais pas comment les filles font pour survivre à tout ça. Les robes, les bijoux, le maquillage - ... dis, je suis maquillé ? »

L'idée venait de lui traverser l'esprit, et il se redressa un peu pour qu'Evelynn puisse regarder si elle ne connaissait pas déjà la réponse. Que n'aurait-il pas donné pour un miroir...

« Enfin, ça l'air tellement compliqué... Respect. »

Il sourit sincèrement. Il s'était déjà vaguement dit qu'il aurait fait une bien mauvaise fille auparavant, il en avait la confirmation.

Garfield ne répondit pas tout de suite. Il se releva, Evelynn se remit droite pour éviter qu’ils ne s’entrechoquent encore une fois. Il s’assit à coté de Lynn comme il y a quelques instants quand Evelynn chipotait encore à ses cheveux mais cette fois-ci il lui faisait face. Lynn, elle ne pouvait pas ramener ses jambes vers elle et se retourner également – pantalon un peu moulant et puis elle portait des chaussures, c’était un peu sale de les poser où l’on s’assaillait – elle ne retourna donc que son buste vers lui.

Il proposa qu’elle le garde, en fait, c’est ce qu’elle voulait demander dès le début – souvenir, souvenir – mais c’était un peu osé et donc elle ne l’avait pas fait. Elle reprit la bague dans la paume de sa main et la serra, comme si elle ne voulait pas qu’on la lui reprenne mais c’était tout de même discret. Et puis, il avait émit une réflexion. Oh. Oui, c’est vrai que Garfield n’avait pas de bague avant le changement de genre … peut-être que la bague va disparaitre… Evelynn, sans s’en rendre compte, était devenue un peu triste, perdant son sourire quelques secondes avant de le retrouver comme si de rien n’était.

« … Je ne sais pas… »  

Elle retourna son regard devant elle, un peu perdue dans ses pensées – écoutant à moitié ce que Garfield. Et puis il lui posa une question. Elle se retourna vers lui, prenant quelques secondes avant de réaliser la question.

« Oh… euuh… »

Elle regarda attentivement le visage de Garfield. Les lumières qui éclairaient n’aidaient pas énormément mais Evelynn remarqua directement le gloss qui brillait sur ses lèvres et une ligne d’eyeliner sur la paupière très fine mais bien visible. Elle lui rendit son sourire et le remercia sans trop savoir pourquoi.

« Oui, tu as du gloss et de l’eyeliner. Tu as peut-être du blush mais je ne peux pas vraiment voir. »

Il avait aussi rajouté quelque chose. Hmmm… C’est vrai que ça pouvait être compliqué pour un garçon, même pour une fille, en fait. Mais c’était plutôt simple de connaitre les noms et les techniques de bases – comme Evelynn. Elle en avait parfois besoin pour certaines occasions donc elle avait appris – elle ne pourrait pas maquiller quelqu’un comme une professionnelle mais elle arriverait à faire quelque chose de présentable.  

« Enfin… c’est pas si compliqué en fait… Et puis, il n’y a pas que les filles qui s’y connaissent. »

Elle pensait bien sur à des stylistes sorciers qu’elle avait vus et puis à tout les backstages avec tous les maquilleurs et accessoiristes masculins. Il y avait même presque plus d’hommes que de femmes, quoique, un tier était des hommes.

« Tu sais beaucoup de marques moldus connus sont designés par des hommes. Hmmm… comme euuh… »

Et voilà. Elle ne se souvenait plus de leurs noms. Elle fronça les sourcils en essayant de s’en rappeler. Rien ne lui venait en tête.

« Désolée… je ne me souviens plus de leur noms… enfin, tu m’as compris ? »

Par réflexe, Garfield avait envie de se frotter les yeux, à présent qu'il savait qu'il était maquillé. Comme il n'avait pas la moindre idée de ce à quoi il ressemblait en fille, il ne pouvait qu'imaginer quelque chose de désastreux, entre une drag queen et Ronald McDonald, quoique les deux ne soient pas particulièrement éloignés sous l'angle du maquillage. Il se retint cependant, aussi satisfaisante que soit l'idée de retirer les peintures de guerre, passant simplement sa langue sur ses lèvres, puisqu'il semblait y avoir un truc non identifié dessus. Il ne maîtrisait forcément pas le geste expert de l'étalage de truc à lèvres quel qu'il soit, mais il restait curieux ; et ça s'avérait dégueulasse. Bon, surtout au niveau de la texture, d'accord, mais ça goûtait le bonbon un peu trop chimique, fraise ou cerise, un truc du genre.

S'il faisait partie de ces hommes qui designaient les marques moldues, il aurait sûrement inventé un, euh, gloss ? Ouais, un gloss, avec un goût supportable. Genre, chips. Ou bacon. Ou, à la rigueur, avec un goût magique qui n'ait pas l'air complètement artificiel. Le pire, c'était que pour une fois, ses divagations mentales menaient vers de bonnes idées.

Enfin, ça lui semblait tout de même assez... gay, cette histoire. Ce n'était pas d'une grande tolérance,  ce genre de pensées, il en était bien conscient, surtout quand on voyait les gens indubitablement différents à ce niveau avec qui il s'entendait, mais on ne pouvait pas nier que l'industrie de la mode était liée à tout un tas de clichés qui le mettaient mal à l'aise. Il était assez tristement englué dans la croyance que s'intéresser aux affaires des filles du point de vue des filles, c'était être considéré comme une fille. Sa maman allait probablement lui acheter ses vêtements jusqu'à ses vingt ans, s'il continuait comme ça. Déjà qu'il luttait pour ne pas prendre mal le fait qu'Alix soit plus virile que lui, il n'allait pas s'engager dans une discussion sur les froufrous avec une fille dont il ne voulait absolument pas qu'elle se méprenne sur ses intérêts.

« Ouais, je vois. »

C'était affreusement bizarre d'entendre son ton habituel des situations de malaise avec une voix féminine, même déformée par la résonance interne. Ce « ouais » avait l'air complètement déplacé, pas assez distingué. Tant pis ; il s'éclaircit la gorge, s'appuyant sur le mur derrière lui.

Il ne savait plus trop ce qu'il devait dire, mais un de ses tics le sauva, alors qu'il mettait ses mains dans ses poches pour se donner une contenance. C'était peut-être un bon moment pour sortir cette fameuse fiole, pour ne pas laisser planer le silence et, accessoirement, pour ne pas finir la soirée avec le flacon planqué dans sa poche parce qu'il aurait encore été trop lâche.

Il prit une grande inspiration.

« J'ai un truc pour toi, en fait. »

Garfield ne savait pas si c'était approprié, ni s'il allait arriver à présenter l'intérêt de la chose correctement, mais bon. Il lui semblait que l'idée était bonne. Il ouvrit la main devant lui. C'était une toute petite fiole, un peu biscornue, avec une étiquette attachée.

« C'est. »

Le moment des explications, et évidemment, il bloquait.

« C'est. Enfin. » Respirer, c'était mieux. Il se sentait rougir. Il n'aurait peut-être pas dû. « Je me suis dit que ça allait être les vacances et tout, et je sais pas du tout comment ça va se passer, et... Enfin, deux mois c'est long. C'est de la potion onirique. »

Première partie exposée, très bien. Il était probablement rouge comme une tomate.

« C'est pour si tu as envie de discuter pendant l'été. Il suffit de me prévenir avant. Y a... enfin, je sais pas si tu en utilises un en dehors de Poudlard en fait, mais y a mon numéro de téléphone sur l'étiquette. Ou un hibou, ça marche aussi. Enfin les hiboux ça vole. » Ahah. L'humour débile était sorti tout seul, il devait se retenir de se passer une main dans les cheveux – on avait bien vu ce que ça donnait. « J'ai une fiole de la même potion, qui correspond je sais pas comment avec celle-ci. Ça permet de partager un. Rêve. Enfin voilà, si ça te tente pas, c'est pas grave, je peux comprendre, je. Enfin. C'était une idée comme ça. »

Voilà. Il se gratta la nuque avec embarras. C'était dit, plus ou moins clairement, il n'y avait plus qu'à prier pour ne pas que ses intentions soient mal interprétées. Il s'était demandé quoi faire avec ces fioles depuis que son frère lui avait envoyées ; Andrew bricolait des potions à ses heures perdues, par amour de la discipline – Garfield ne comprendrait jamais, à part peut-être si le frangin avait eu un crush sur Mrs. Mantis dans son jeune temps. Bref, de temps en temps, il recevait des fioles, parfois utiles, parfois pas. Restait à savoir si celle-ci serait acceptée.

Spoiler:

Evelynn ne savait pas vraiment quoi dire maintenant. Elle avait finit de raconter son blabla et Garfield avait terminé la conversation sur le sujet. Elle regarda en face d’elle, levant son regard de temps en temps pour regarder les fées qui éclairaient toujours les tunnels. Puis comme presque toujours, Garfield brisa le silence – lui offrant quelque chose.

« Oh ? »

Qu’est ce que ça pouvait bien être ? Est-ce qu’il avait prévu de lui donner un cadeau depuis le début ? Quelle question ! Bien évidemment qu’il l’avait prévu, enfin, tu ne pouvais pas te balader avec une fiole et comme ça la donner, à part, si tu voulais juste t’en débarrasser. Enfin soit. Il avait l’air nerveux. Il lui présenta une fiole.

« C’est… ? »

Quelle potion était-ce ? Evelynn n’était pas assez doué pour reconnaitre une potion grâce à sa couleur et sa texture. Elle avait déjà vu des potions similaires en cours mais elle ne se rappelait plus de leur noms, ni de leurs effets – enfin, Garfield allait bien expliquer ce que c’était s’il voulait l’a lui donné et c’est ce qu’il fit. Une potion onirique ? Elle fut étonnée en entendant ça. Qu’est ce qu’elle pouvait bien faire avec ça ? Enfin, avec qui elle pouvait la partager. Elle continua à écouter ce que disait Garfield. Oh, il voulait qu’ils la partagent. Les joues d’Evelynn commencèrent à se rougir
comme celle de Garfield. Elle murmurait.

« Hmm… L’idée en elle-même ne me dérange pas… »

Mais… Mais elle ne savait pas de quoi elle rêvait – enfin elle ne s’en
rappelait pas et puis si elle rêvait de quelque chose de bizarre, est-ce que Garfield le rêverait aussi ? La seule pensée rendit ses oreilles toutes rouges, merlin, que c’était embarrassant.

« Et puis… Je n’ai pas de téléphone… »

Elle n’en avait jamais eu besoin. Les hiboux lui suffisaient largement et puis, elle ne communiquait pas énormément avec les personnes de Poudlard quand elle était à la maison.

« Donc je devrais surement t’envoyer un hibou… et ça pourrait prendre du temps… »

Elle parlait toujours d’un ton bas, parce que sa voix était un peu étouffé par ses mains qui s’étaient glissés sous sa lèvre et parce qu’elle était toujours embarrassé – elle préférait avoir une voix basse que trop haute et trop aigu.

« Enfin… Je peux quand même la prendre ? »

Elle avait une de ses mains toujours glissés sous sa lèvre et elle mit son autre main au dessus de celle de Garfield – celle qui tendait la fiole.

Evelynn émettait surtout des réserves à son idée, et Garfield se serait presque découragé. Néanmoins, elle disait aussi que l'idée ne la dérangeait pas, c'était sans doute déjà bien.

Elle rougissait ; peut-être que le cadeau l'embarrassait. Garfield sentait ses joues chauffer également, une honte sans objet issue de l'incertitude de la réaction de sa cavalière. Il aurait sans doute dû garder cette idée pour lui, et se contenter de lui envoyer une ou deux lettres, une carte postale, et voilà. Il ne la connaissait sûrement pas assez.

Et puis, malgré les objections, elle tendait la main pour prendre la fiole, et le garçon se rendit compte qu'il retenait son souffle depuis qu'elle avait commencé à parler. Il ouvrit la bouche, comme un poisson hors de l'eau, une fois, deux fois, avant de réussir à parler.

« Bien sûr tu peux la prendre, elle est pour toi... »

Il leva la main, pour que le flacon touche la paume de la jeune fille.

« Avec un hibou ça ira très bien. »

Même s'il espérait très fort qu'elle déciderait de lui envoyer ce fameux hibou, il pouvait comprendre que ce soit un peu bizarre, comme situation. Lui-même n'avait pas trop d'indications sur la manière dont la potion fonctionnait. Il ne savait pas quel décor elle créait, si elle en faisait un, ni s'il y avait moyen de l'influencer de quelque manière que ce soit. Il y avait longuement pensé, après qu'il ait eu l'idée, en se disant que ça la foutrait quand même mal s'il invitait quelqu'un dans un rêve où son imagination ne savait pas se tenir, mais il s'était dit que, si cette potion était utilisée, elle était probablement sûre et contrôlable. Il fallait l'espérer, du moins.

Il sourit un peu.

« Du coup, ça peut être n'importe quand. Il faudra juste que je pense à dormir tôt ce jour-là. »

C'était moins évident qu'il n'y paraissait, avec les nuits blanches inévitablement apportées par l'été. Et si, en plus, il avait une insomnie, avec le stress ? Il déglutit. C'était peut-être vraiment une très mauvaise idée. Il toussa un peu, pour se donner une contenance. Et si ça se passait tout simplement mal ? Et si... Et si... Les cas de figures catastrophiques qu'il n'avait pas envisagé se succédaient dans son esprit, et il était sans doute de plus en plus rouge.

« Enfin... Ce sera à toi de voir, évidemment. Je veux pas, enfin... Faut pas te sentir obligée. Si tu vois que t'as pas envie de me parler pendant les vacances, il suffit de ne pas l'utiliser et c'est tout... »

Il avait l'impression de marcher en équilibre sur la fine ligne entre « proposer un truc chouette » et « imposer une idée envahissante à quelqu'un qu'il ne connaissait pas si bien que ça », et ce n'était pas évident à gérer.

La fiole qu’offrait Garfield avait fini ancré dans la paume d’Evelynn. Elle serra sa poigne et rapprocha sa main vers sa poitrine – comme pour voir si elle était vraiment là, et puis elle enfonça la potion au fond d’une de ses poches pour ne pas la perdre malencontreusement. Mais peut-être qu’à cause de la potion ses vêtements allaient se changer et que la potion disparaitrait… Quoique Garfield avait déjà subi le changement et la potion était resté donc pas de soucis. Ouf. Les joues d’Evelynn étaient toujours aussi chaudes qu’elle l’était mais maintenant, ça ne la dérangeait plus autant. Elle espérait vraiment qu’un jour, elle arrêterait de rougir à chaque proposition de Garfield comme elle avait fait pour lorsqu’il l’avait invité au bal – même si ça ne se voyait pas à cause de la varicelle qu’elle avait réussi à attraper.

Et donc le hibou ne sera pas un problème mais c’était vrai que si elle avait eu un téléphone, ils auraient pu discuter directement sans attendre les heures de vol qui séparaient leurs deux maisons et ils auraient également pu se parler directement à vive voix mais il fallait le payer et le rendre rentable alors qu’elle n’aurait surement jamais retenu son numéro de téléphone et qu’elle aurait oublié de l’apporter avec qu’elle pour justement donner son numéro ou tout simplement enregistrer celui dont elle voulait le numéro.

« Non ! Non ! J’ai très envie de parler avec toi… euuh… enfin de rester en contact pendant les vacances… juste que … tu m’as un peu pris par surprise avec ta proposition et que … »

Elle ne trouvait plus ses mots – pressée de vouloir s’expliquer et bien évidemment elle ne voulait pas que Garfield interprète mal ce qu’elle voulait dire parce qu’elle était trop maladroite. Enfin…

« Euuh… On se met d’accord sur une date alors… vu que l’hibou mettra au moins quelques jours pour faire le voyage…  enfin… »

Oui, les hiboux prendraient bien quelques jours pour faire le chemin de l’Ecosse à Londres. A moins que l’hibou en question soit très rapide et très endurant mais ce serait un peu de la maltraitance contre les hiboux de le forcer à faire le chemin sans s’arrêter, s’en boire ou sans manger, et à très grande vitesse. Et puis il faut compter l’aller-retour et est-ce qu’ils pourraient … ?

« Ah ! hmmm… je me demandais si on pou– »

Elle sursauta aux bruits qu’elle venait d’entendre, sans s’en rendre compte elle se rapprocha de Garfield – comme s’il était devenu son bouclier.

« Je crois que j’ai entendu un bruit… »

Un bruit, autre que sa voix, venait de briser le silence qui s’était installé autour d'eux – quelque chose qui ressemblait à un sifflement.

Garfield se sentit se détendre, juste un peu. L'idée était passée correctement, Evelynn était d'accord. Enfin, au pire, si elle disait ça pour lui faire plaisir, il lui suffirait de ne pas envoyer ce fameux hibou. C'était bien mieux que d'être rejeté de vive voix. Il s'avéra juste après qu'elle était vraiment intéressée, puisqu'elle parlait de convenir d'une date à l'avance. Il se sentit sourire très stupidement, en hochant la tête avec sans doute un peu trop d'enthousiasme. Il n'avait pas vraiment confiance en lui, et c'était le genre de choses où il n'arrivait pas à croire à sa chance. Elle voulait vraiment qu'ils parlent un peu plus.

Bien sûr, il ne lui était pas passé par la tête que si elle avait accepté de venir au bal avec lui c'était que, effectivement, il ne la dérangeait pas. Si on lui avait demandé, il aurait certainement invoqué la pitié ou un truc du genre. Il était maladroit, pas spécialement intelligent, son humour était plutôt débile, et il n'était pas vraiment un joli garçon, de ce qu'il en pensait, alors il voyait difficilement les raisons qu'elle avait de ne pas l'envoyer péter. Mais bon, il n'allait pas se plaindre.

Soudain, elle sursauta, sans raison apparente, pour se rapprocher de lui. Ce n'était pas non plus quelque chose de déplaisant, mais il se demanda un instant ce qui lui arrivait.

« Euh... ? »

Elle avait entendu un bruit. Il se sentit à nouveau sourire, quoiqu'il cacha son début d'hilarité. Un sifflement. Elle avait tellement bien marché dans sa blague d'un peu plus tôt qu'elle avait probablement encore en tête cette histoire de basilic. Garfield n'avait absolument pas confiance dans les gens sensés tenir cette école en un seul morceau, au vu de ce qui s'était produit à peu près à chaque jour particulier de l'année, mais laisser un serpent géant venimeux et létal au moindre regard, c'était tout de même un peu gros. Il y avait rarement des morts à Poudlard, et c'était plutôt heureux ; le corps professoral, aussi cinglé soit-il, n'allait pas laisser les statistiques exploser sur une seule soirée.

Néanmoins, c'était tentant de la faire marcher encore, parce que cette réaction était diablement mignonne, si l'on faisait abstraction du fait qu'Evelynn était pour l'instant un garçon. Il ouvrit la bouche pour l'embêter à nouveau et lui raconter toutes sortes de bêtises sur les probables descendants du basilic qui se promenaient bien sûr dans la fête sans que personne ne les ai remarqués, mais il fut coupé dans son élan, par des éclats de rire au bout du couloir. Apparemment, c'était simplement une blague, de petits malins qui s'étaient délectés de la réaction de panique, croyant probablement qu'elle leur était commune au vu du temps de réaction de Garfield.

Il secoua la tête en riant un peu lui-même.

« Les cons... ça va ? »

Evelynn était vraiment tout près et, sorti de sa possibilité de rentrer dans la mauvaise blague, il se sentit rougir. Quelque part, c'était heureux qu'il n'ait pas eu le temps de l'embêter lui-même, elle l'aurait peut-être mal pris, mais bon, c'était un réflexe de sale gosse. Il toussa un peu, faussement, et se leva, pour s'écarter.

« On va faire un tour vers la grande salle ? Je suis curieux de voir les autres, en fait. »

La soirée avançait, en plus de ça, mais il n'avait pas la moindre idée de l'heure qu'il était. Il lança un sort de réduction sur ses chaussures qui traînaient par terre avant de les glisser dans sa poche, au cas où elle se retransformeraient en sa seule et unique paire de chaussure le moment venu. D'ailleurs, il espérait que c'était bientôt.

Pendant quelques secondes, il ne se passa rien. Silence. Evelynn regardait légèrement de droit à gauche, cherchant ce qui devait arriver. Le basilic devait pourtant ne pas être là, ils devaient l’avoir retiré – elle attend, elle s’y attend, se préparant mentalement à son arrivée. Mais rien n’arrive, rien ne se passe, juste des rires au bout du couloir. Ce n’était qu’eux. Evelynn laisse échapper un soupire de soulagement et relâche légèrement sa poigne qui tenait le bras de Garfield.

« Désolée… »

Evelynn avait surement réagit excessivement. Même si ça n’avait pas dérangé Garfield qu’elle s’accroche ainsi mais en s’en rendant compte, elle commença à rougir. Ce n’était pas dans ses habitudes de s’agripper à quelqu’un, encore moins si ce quelqu’un était un garçon – bien que ce soit Garfield, qu’ils se connaissent depuis un moment déjà et qu’ils fréquentaient presque les mêmes cours, à l’exception d’une de leur option. Evelynn aurait pu prendre étude des moldus à la place d’étude des runes mais quelque chose l’avait poussé à choisir le deuxième cours ; son instinct Serdaigle ou je-ne-sais-quoi et donc, pendant quelques heures de cours, ils ne se croisaient pas. Puis il y avait également le fait qu’ils soient tous les deux dans l’équipe de Quidditch respective à leur maison ; et forcément les entrainements entre deux équipes se faisaient parfois, puis, les matchs officiels qui se déroulaient pendant toute l’année. Garfield et Evelynn se côtoient énormément en fait !  

D’une petite toux et d’un petit saut en avant, Garfield se dégagea, vu que l’idée de s’écarter n’était même pas passer par la tête d’Evelynn, et il proposa de faire un tour vers la Grande Salle qu’ils avaient abandonné depuis presque le début de la fête.

« Oh ! Bien sur si tu veux. »

Elle n’avait aucune raison de refuser et puis, ils n’allaient pas rester toute la soirée dans les galeries. En plus, les deux sorciers n’étaient pas friand de danse donc même s’ils revenaient vers la salle de bal, ils ne danseraient pas – ce qui soulagea grandement Evelynn. Elle fit un petit saut pour se retrouver sur ses pieds et se mit au coté de Garfield, qui venait de mettre ses chaussures miniaturisés dans ses poches presque invisible.

« Oui … c’est vrai que j’aimerais bien voir l’équipe de Quidditch en … genderbend. Ça pourrait être marrant. »

Seulement l’imaginer la fit déjà sourire.

« On y va ? »

Elle se retourna avec un plus grand sourire vers Garfield, comme si la jauge d’émotion « heureuse » avait monté.

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