La brunette se retourna à plusieurs reprises, essayant de discerner les personnages encore vivants qui s'agitaient là-bas. Pendant ce voyage, duquel ils sont clandestins, elle n'a le droit qu'à ce dos imposant qui l'a toujours un peu effrayée. Son sourire s'étend sans justification, elle est tout à fait soufflée par sa déduction. Les galeries. Non, vous comprendrez très vite qu'ici le génie n'est pas Sloan. Et ne le sera jamais.

Elle retrouve la chanson qu'ils avaient perdu des mètres plus loin, le dévisageant sans trop comprendre et toujours abasourdie. Wesley pose son verre, elle s’exécute et le suit, murmure seulement "qu'est ce que tu fais ?" mais toujours bercée par cette mine amusée. Ensuite.

« Wesley... par Merlin. »

Holmes ne cherche plus, l'acolyte à trouvé la solution. Elle aurait pu afficher une moue pleine de tristesse, parce qu'elle a renoncé à Sherlock longtemps avant, mais au lieu de ça, elle dépose ce qui occupe ses gestes au sol, replace ses bracelets de sa main libre dans un soupir et oublie le reste. Elle sait que cette soirée est la leur, qu'il ne serait pas très professionnel de refuser une mission fourbe comme celle de Watson.
Sloan s'apitoie d'un rire nerveux et saisit le col du Chesire, d'une patte de velours.

« Tu sais très bien que j'aurai préféré le Basilic. Enfin, le Basilic ou une danse avec toi, Eugene. »

C'était là toute la provocation, Watson. Attrape-moi, surtout.

Dans le fond résonnait l’écho des Weird’Brother qui s’époumonaient joyeusement sur une chanson au rythme déchainé.  Ca ne collait absolument pas à l’esquisse de danse dans la pénombre. Les sauts périlleux, on les gardait pour la salle de duel quand jaillissait un tarantallegra particulièrement carabiné.  L’autre alternative, une danse volontaire était réservée au post Quidditch où tout le monde sautillait sur place en criant dans les oreilles de son voisin, du moins si toute la troupe tenait encore debout, bien entendu.  Le poufsouffle roula des yeux, en essayant d’avoir l’air plus exaspéré qu’il ne l’était vraiment et surtout de ne pas rire.  Sloan, tu es terrible, tu sais ? Bien entendu, il avait fallu que ses parents l’affublent d’un nom de grand-père tandis que Miss Holmes s’en sortait comme un charme avec un nom désuet mais original.

«Je vois, tu dois être très déçue d'être coincée avec moi maintenant alors! Je ne te savais pas aussi mordue des serpents, en plus! Peut être que les Weird’Brothers sont là pour ça, en fin de soirée un grand numéro de charmeur de serpent géant! »

Si l’excentrique directeur s’était donné la peine de sortir de sa batcave, on pouvait craindre le pire des bizarreries  magiques.  On pourrait même qualifier difficilement l’ensemble de danse.  Une main aux creux de la sienne, l’autre sur sa hanche, ils évoluaient   tranquillement en cercle, en piétinant sur place.  On pourrait danser ça sur une assiette.  Un battement de silence avant que le jeune homme dans une imitation de sérieux trahi par ses yeux murmurait dans une confidence.

« Ne me dis pas que tu vas profiter de l’été pour te lancer dans l’élevage sauvage de Basilics ? Ca ne doit pas être très légal comme hobby je crois.»

Leur demi-vampire jardineuse en chef devait en cultiver. Mais  l’autre genre, pas celui qui sifflait! Etrange comme l'été semblait plus comme une finalité qu'un moment attendu pour bon nombre d'entre eux.

« Je suis tellement furieuse, si tu savais, je pourrai te mordre le nez, là tout de suite... je suis une mordue de serpents après tout. Oh oui ramène-moi aux Weird'Brothers. »

Mais tu sais qu'elle ne l'est pas, ses mains se glissent où tu veux bien la voir glisser, même si elle est petite. Et ne peut pas t'enlacer. Ça ne l'affole pas, ça l'agace un peu, voilà tout. Il y a eu un laps de temps où tu arrivais en face de ses yeux, en face d'elle tout court. Mais ça, aussi bien que ton talent pour les farces, ça avait changé. Alors elle te calquait simplement, apportait un peu plus de mécanisme à cette danse sans forme qui lui plaisait malgré tout. Si elle te croise ensuite, c'est pour te tirer la langue. Et disparue, Sloan s'efforce de s'imaginer la scène, au bord du fou rire.

« Oh c'est totalement illégal mon Wesley. »

Elle lui lâche la main, peu décidée à suivre la démarche maladroite. Se recule et inspire longuement. On l'avait préparée à beaucoup de scénarios survie-apocalypse mais pas vraiment à une danse avec Wesley. Eugene. Peu importe. La serdaigle dégagea les verres contre le mur de la galerie.

Holmes lui vola ses mains, fit deux, trois pas en arrière et le regarda fixement dans les yeux.

« Tu me fais confiance, j'espère. »

Et la voilà qui l'incite à tourner, tourner parce qu'ils sont un manège, qu'elle a envie de tourner et seulement ça. Eugene j'avais dit que c'était de la provocation !

« VIVONS DANGEREUSEMENT. »

Règle numéro un : toujours se méfier des gens qui ont non seulement vu Grease plusieurs fois, mais surtout toujours craindre ceux qui ont vu la séquelle !  En particulier quand il s’agissait de Sloan qui avait cette lueur folle dans le regard des coups fourrés en préparation. Et contre toute logique, il se contenta d’un hochement de tête sans la moindre hésitation tandis qu’Holmes pastichait Aladdin.  

«Qu’est-ce que j’y peux : tu as une très mauvaise influence sur moi.»

S’il faut être deux pour danser, il faut apparemment être également deux pour se comporter comme de parfaits idiots. La facilité de l’absence d’enjeu qui permettait d’être jeunes et de danser comme s’ils étaient dans la cuisine. Sloan Holmes était peut être la personne la plus dingue et brillante qu’il avait la chance de connaitre et c’était dans un quasi fou rire qu’il la rejoignait à pieds joints dans sa dangereuse expédition. Il laissait la tornade Holmes tournoyer à sa guise, accompagnant doucement son geste pour assurer un peu d’équilibre.  

« Doucement, tu vas tomber si tu continues. »




Effectivement le sol avait l’air glissant, plus glissant que tout à l’heure surtout. Wes jeta un coup d’œil au plafond qui laissait filtrer une sorte de liquide puis au sol. Et un grand hoquet de surprise en constatant que subitement ses jambes n’étaient plus vraiment ses jambes et il y avait autre chose dans son champ de vision s'il regardait vers le bas. Ille ne savait effectivement plus sur quel pied danser, dans un équilibre plus que précoce et se sentant particulièrement désorienté.  

Ce n’était franchement pas du jeu ! Le poufsouffle avait passé les seize dernières années à apprendre à se sentir petit à petit mieux dans sa peau et quand il commençait enfin à toucher au but : changement de corps de A à Z. Retour à la case départ, ne touchez pas 200 gallions ! Avec un centre de gravité aussi différent, même marcher relevait du challenge. Parce que si sa version féminine d’un univers alternatif parallèle savait évoluer sur des talons, ce n’était franchement pas le cas de Wesley qui s’accrochait à une épaule Holmesienne bien plus haute que d’habitude comme à une bouée de sauvetage. Jefferson -pour le coup Jefferdaughter ?-  semblait avoir pris une douche d’eau glaciale tellement elle restait crispée les yeux fermés comme un chat que l’on venait de lancer dans la baignoire.

« Oh non. Pas l’épreuve des poteaux de Koh-lanta ! »  

Ce n’était pas le fait d’être changé en fille le véritable problème, après tout à Halloween il avait vu des amis se changer en zombies, littéralement, un chromose X en plus ce n’était pas vraiment la pire chose qui aurait pu arriver. Adieu le costume, bonjour une longue robe (♥)  qui n’aurait pas déchanté dans un club de Jazz.  Le tissu cascadait en dessous des genoux mais la robe étant particulièrement ajustée et près du corps soulignait  joliment une silhouette toute en jambes et formes. La couleur rose pale et les broderies fleuries faisaient pencher l’ensemble sur une apparence innocente pin-up plus que Jessica Rabbit. Non, le problème résidait dans ses charmantes chaussures qui causeraient sa mort aussi surement que le Coach Morgan pouvait mettre un troll KO avec son seul auriculaire gauche.

Tout ce qu’il voulait c’était de passer une soirée agréable, explorer  avec sa partenaire des galléries millénaires à la recherche d’un serpent géant fossilisé, de s’amuser avec ses amis dans un monument historique avant de souffrir l’épreuve des examens. La souffrance était encore au programme mais le reste venait de tomber à l’eau. Il serait connu comme celui qui se serait pété la nuque lamentablement en glissant sur ses talons hauts. Il aurait une bonne chance d’entrer dans le top 10 des morts les plus ridicules de l’histoire de l’école. Hourra ! A choisir, il préférerait presque le Basilic, enfin le Basilic avec un petit nœud sur la tête maintenant vu l’effet de la pluie ?

« Wesley ? »

Sa voix n’était plus crédible, d’ailleurs elle commençait à tourner tellement vite qu’il lui sembla que le jeune homme avait disparu. Enfin il s’agissait surtout d’une défaillance moteur, puisque l’instant d’après, la roue toute affolée ralentit. Elle se concentra suffisamment pour entendre au loin l’écho des Weird’Brothers, mais pas assez pour distinguer celui à qui elle sacrifiait les derniers muscles encore actifs de ses poignets. Puis élancés dans cette valse maladive qui ne leur allait qu’à eux, à bon entendeur, ils levèrent le nez sur le plafond, une seconde, elle se demanda - est ce que cette robe va tenir le coup ? - avant d’hésiter à s'étrangler d'un gloussement primitif et peu civilisé. Cela dit, en baissant les yeux pour quitter le spectacle dégoulinant, elle trouva un Wesley.

« ...Mon jus de citrouille devait être pas très frais. Oui Viridus a du mettre quelque chose dedans. »

Le charabia lancé en face, si ça avait été causé par son manque de contrôle évident, elle comptait s’en excuser. Mais à la place, elle ne recevait que les ondes hilares d’une émission moldue plus huée qu’autre chose, se surprenant à soulever un sourcil lourd, savait-on jamais elle était fatiguée de tourner. Ou bien simplement avait-elle fini par reculer. Sinon comment expliquer la main plantée, ongles manucurés de façon très Ronove, dans son bras pendant qu’elle décortiquait la chose des prétendus Adams du regard. Enfin non on parlait de Wesley. Qui d’autre. A QUI D’AUTRE SERAIT CETTE MAIN AUTREMENT.

Des créatures synchrones qui se fixaient à présent dans le parfait silence - quoique Koh-Lanta pourrait résonner encore vingt-sept fois dans son crâne, elle ferait abstraction. Lentement et sans l’autoriser à lâcher son bras (puisque décidément LA MAIN était plantée dans son. Heu. Costume-cravate-amélioré-pardon-quoi ?) elle toucha ce visage. Le genre de visage qu’on a jamais vu, alors on veut un peu profiter, peu importe la circonstance. Elle est convaincue qu’elle hallucine, aussi bien qu’on a mis Wesley dans son viseur. Sloan est muette. Ah elle a posé un index sur la joue et l’a enfoncé sans aucune classe. Mais au moins Wesley a ouvert les yeux.

Et quels yeux.

« Quand je te demande de pas me laisser seule avec une fille. Je plaisante pas. Watson. Tu es une plaie. »

Il lui faut bien une minute pour que son ton se calibre et qu’elle arrête d’essayer de la rendre potable. Oui c’est le genre de voix irritée, un peu grave, mais pas de trop, qui lui remonte à la bouche et l’effet est bizarre. Cependant pas plus bizarre que cette. épaule de fille et cette robe de fille. Surtout que l’ensemble et entraînons Wesley là-dedans, est à jeter des confettis dessus.

« Tu m’expliques. Où est passée ta touffe de cheveux indomptable. Ingérable. Super. Rebelle. Pourquoi. WESLEY DIS QUELQUE CHOSE. »

Espérons qu’à un moment. Sloan remarquera la super cravate nouée à son col. De garçon.

Une soirée normale ce n’était pas trop demander, non ? Naïf, va !  Apparemment à Poudlard oui, l’école où les élèves venaient sans doute de se faire empoisonner pour la deuxième fois en moins de six mois.  Le poufsouffle avait décidé d’entrer dans une phase de déni total.  Les yeux fermés, il ne manquait plus qu’à se boucher les oreilles et faire comme si de rien n’était mais il était hors de question de lâcher son ancre vivante et la musique qui résonnait avait définitivement des accents différents.  Plus Weird Sisters que Brothers.  Le jeu de l’autruche prit fin avec l’arrivée d’une main masculine volante assez curieuse. Wes cligna, essayant de gérer à la fois le chaos ambiant et de ne pas laisser s’exprimer sa terreur actuelle dans un couinement sans doute trop aigu. Ses lèvres s’entrouvrirent dans sa meilleure imitation de la sirène hors du lac noir. Il hésitait entre répondre « Quelque chose » et « Les chaussures veulent ma mort », un peu trop dramatique avant de se décider.

« Super rebelle ? »

Répéta-t-il avec toute la confusion du monde.  Rebelle n’aurait probablement pas été le terme caractéristique pour définir Wesley Jefferson. Par habitude, il porta une main dans ses cheveux dans un geste gêné. Mais Wes avait légèrement négligé un léger détail, avec sa nouvelle apparence il pouvait oublier de suite de le réflexe de s’ébouriffer les cheveux. Sa main se perdait dans les longues et douces boucles brunes, surpris de découvrir ou plutôt de redécouvrir leur texture. Ses doigts restèrent pris au piège, emmêlés dans ses nouveaux cheveux pendant qu’il se débattait avec sa crinière avec un soupir de frustration. Une mèche rebelle lui tomba sur le visage et « elle » essaya de la chasser en soufflant dessus avant de reporter son entière attention en face.

«Hum…Ne panique pas mais y a pas très longtemps on faisait un duel avec Drew et il a utilisé un sort que je connaissais pas et en gros ça faisait la même chose. Sauf qu’aujourd’hui c’est à plus grande échelle et ? Et tu es vraiment très… très grande. »

Wes dérivait gentiment face à la fascinante découverte qu’il lui fallait lever les yeux pour pouvoir croiser le regard d’Holmes 2.0. Nouvelle surprise ! Même quand ils étaient enfants, ils se trouvaient à la même hauteur puis Bambi avait fait sa folle envolée verticale et baisser les yeux pour pouvoir se mettre à la hauteur des autres était devenu son quotidien. L’inverse était vraiment perturbant et il faisait de son mieux pour essayer d’associer Sloan et cet inconnu pas si inconnu en face.  Il y avait quelque chose de profondément familier malgré les nouveaux traits. Sir Holmes avait la même façon d’être surpris que son alter-ego féminin.  Wesley éleva sa main libre, ce n’était pas très digne de s’accrocher à Sloan comme une huitre à son rocher mais c’était bien plus digne que de se casser la figure,  intrigué avant de se rediriger et rajuster sa cravate.

Là elle se sentit stupide. Littéralement. Et Wesley pourrait se plaindre de sa moue affreuse, mais encore une fois, il avait été plus proche de la réalité que Sherlock. Dans cette enveloppe, elle avait l’étrange et désagréable impression d’être deux fois plus frustrée que d’habitude, elle se serait sûrement énervée en conclusion, mais c’était elle qui avait coupé court les expéditions sherlock-watsoniennes. Le fait étant que. Se plaindre publiquement, officiellement de son incompétence lui était scientifiquement impossible. De même pour la main de Wesley. Jamais Sloan n’aurait imaginé qu’on puisse autant enfoncer quelque chose dans autre chose et…  Il fallait qu’elle se calme. Il fallait qu’elle se calme très vite mais pas facile quand le partenaire est aussi secoué que vous, franchement pas.

« Je… Je panique pas qu’est ce que tu racontes c’est pas comme si t’étais une fille et que je t’avais demandé de faire gaffe avec tes sorts. MAIS en fait je réalise que c’est pas toi alors c’est comme si je t’accusais à tord et c’est totalement débile mais c’est marrant tu. Tu fais quoi avec cette cravate. C’est vrai c’est juste une cravate, la touche pas Wes. »

Holmes dans la réaction impulsive et précipitée, hyperactivité en cause repousse immédiatement la mèche fugueuse de Wesley derrière son oreille, sans trop comprendre ce qu’il pouvait bien être en train de faire avec son cou et ce qui était noué à son cou.

Oui c’était plus facile de le retenir et de ne pas insister pour qu’il replace cette cravate mais. Les informations défilaient à toute vitesse, elle agrippa le poignet de son compagnon, ouvrit grand les yeux et se stoppa net. De loin c’était là la plus belle enquête qu’on pouvait espérer le jour d’un Bumblebee Day. Voir ce qui a changé. Constater. Mais elle ne constate rien si ce n’est que la robe en face, rose nacré et toute en longueur est fort sympathique, les indices ne sont pas présents en masse. Non. Elle se questionne soudain. Tilt.(pour une fois, l’avantage était à la hauteur ahah).

« Au moins ce sera plus pratique pour danser ? Je veux dire pas que j'aie envie de danser parce que après tout je nous ai interrompus. Mais on est pas doués non. »

Les lueurs de fées perçaient doucement l’obscurité de la crypte.  Les éclairages allongeaient les ombres frémissantes sur les visages métamorphosés, y creusant le moindre relief élégant.  Wes continuait d’essayer de se accoutumer à l’inconnu, et à chaque fois qu’il pensait avoir une idée claire de ce nouveau visage, l’éclairage ondulait et lui laisser à voir défiler sinueusement de nombreux reflets aux nuances vertes sur le visage pale en face.  Et il fut aussitôt pris d’un doute, Sloan était à la limite de la pâleur du masque mortuaire, un peu plus et les ombres vertes seraient plus dues à un état proche de la nausée plus qu’à des fées. Immédiatement, il ne pouvait s’empêcher de se sentir presque coupable, c’était lui qui l’avait trainé à ce bal, elle ne voulait même pas y aller à la base ! Et maintenant, elle se retrouvait victime d’une transformation bizarroïde de plus alors que Wesley lui avait promis une soirée normale.

Il ravala son instinct de survie qui était dans le rouge en présence des chaussures à talons, et força sa main à desserrer légèrement sa prise qui ressemblait presque à une griffe dans la panique. Le poufsouffle gardait quand même son appuie sur Holmes – pas fou le blaireau, embrasser le sol ça ne lui disait toujours rien- avant de maitriser sa voix qu’il voulait calme.

« Sloan, regarde-moi. »

Il leva les iris gris ombragés sous le couvert de longs cils fournis avant de voir Holmes répondre à son injonction. Wes soutenait son regard sans ciller avant de reprendre. Quand Sloan disait ne pas paniquer, il y avait environ 99%, virgule non incluse, de chance que ça soit l’inverse.

« Respire, tout va bien. C’est toujours moi, tu vois ? Ca va s’arranger, promis, ça doit juste être une blague pour marquer la fin de l’année.  Rien de plus, on n’a pas changé, enfin juste de corps, je veux dire. Le reste, c’est pareil alors pas de panique. Ou un tout petit peu de panique, d’accord? »

Un léger sourire en coin, Wesley replaça correctement la cravate et lissa du bout de la main le tissu de la veste qui avait subit son assaut.

«Voila, là tu fais James Bond comme ça. »

Son sourire se substitua immédiatement en un air légèrement embarrassé à la simple mention de bouger, il attrapa une mèche de cheveux à triturer. Il avait la sale impression de se retrouver être Ariel qui vient juste de troquer sa queue de poisson contre des gambettes. En encore plus maladroit mais la robe en filet en moins.

« Uh… Je suis pas sûr de savoir encore comment marcher là dessus, pour être honnête. »

« Oh vraiment. Tu sais que tu me flattes là ? »

Elle l’aimait sa capacité à s’inquiéter de tout, sa maladresse pour détendre l’atmosphère, sans succès, le petit regard en coin lancé toutes les cinq secondes et la main toujours tendue, prête à accueillir n’importe qu’elle Sloan tremblante, transformée en on ne savait trop quoi. Mais c’était pourtant très simple. Tant qu’il s’agissait de Wesley elle arrivait à se calmer, à ne pas trop en faire, c’était lui qui lui avait appris. Ne pas porter le masque, savoir respirer. Oui la plus simple action du corps humain, on avait du lui remontrer, lui assurer que c’était possible, surtout quand elle faisait constamment, constamment semblant.
Alors Wesley venait d’affirmer sa folle hypothèse.
Il lui faisait confiance, et réciproquement.

La panique, la panique arrivait par où elle voulait bien arriver, cela dit elle avait un fond jaune, un fond comique, Sloan hésitait. Le retournement était déjà plus convainquant, plus amusant et plus éducatif que le coup du clafoutis. - Bien sûr elle ne toucherait pas aux cerises aujourd’hui, même si elle se questionnait sur les ingrédients du ponch - un ponch aux cerises, ce serait le comble ! Et noyée dans le ponch, Sloan revient à Wesley qui l’appelle avec ses beaux yeux de biche, les yeux d’une fille. Et elle ne sait pas quoi penser. Pourtant l’isolement est rassurant, le fait d’être seuls, ici, sans trop de silhouettes perchées sur des tables, en pleine anarchie. Elle pensait rester là et ne faire que danser avec son acolyte. Maintenant son acolyte était accroché à ses épaules, et ça ne la faisait même pas tomber. La bleue sentait bien qu’elle était plus consistante, plus à même de tenir cette Ariel asiatique complètement affolée comme plantée sur des échasses. Et Sloan rigola, Sloan éclata d’un rire qu’elle ne connaissait pas, ça la fit se retenir une seconde, mais ça ne suffit pas à retenir toute la nervosité, elle éclata par la bouche et Sloan avait ce rire charismatique. Sans doute un peu volatile, sans doute appréciable. Elle était contente de ne pas avoir envie d’embrasser Evelynn. Elle était vraiment contente.

« Non ça va je t’assure. T’es gentil. Et tes cheveux, tu vas me rendre jalouse. De quoi ils ont l'air mes cheveux maintenant hein ? »

Elle s’apprêta à bouger sa main de la hanche toute en courbes de Wesley pour attraper quelque chose, mais ça lui revint; elle avait oublié ses converses dans sa chambre. Non, elle ne serait jamais sortie du dortoir sans ses précieuses baskets moldues, elle n’aurait pas tenu toute la soirée affublée de sandales bien mignonnes, qui lui irritaient les orteils et coloraient sa peau pâle. Alors elle adressa ce petit regard désolé au Watson et trouva doucement ses pieds de là, c’était étrange quand Sloan passait la majeure partie de leur temps ensemble à lever la tête pour espérer voir quelque chose.

« Wesley retire tes chaussures, tu veux. »

Quoi tu n’es pas convaincu.

« Sinon je peux pas danser la macarena avec ma James Bond Girl. »

La Terre appelle Holmes, nous recevez vous Holmes ? Revenez sur Terre, c’est un peu bizarre en bas mais ce n’était pas si mal. Petit à petit, battement de cils après battement de cil, Sloan faisait la mise au point et son regard ne papillonnait plus autant, sa respiration ne ressemblait plus à celle du commun des mortels en haut de la montagne russe pour se stabiliser sous, au sens propre comme au figuré maintenant, le regard ourlé de cils courbés de Wesley. Son sourire se voulait encourageant mais il était tout sauf fier sur ses rehausseurs pour pieds mais la peur de la glissade peu distinguée, il manquerait plus que de déchirer la robe au passage et il aurait gagné sa soirée, s’échappa de son esprit pour un instant face à un rire qui résonnait dans la galerie.

D’un naturel total, inimitable même dans une tonalité différente, même plusieurs octaves en dessous de d’habitude. Le rire, ça a toujours été particulièrement communicatif, plus contagieux qu’un bon rhume après le match de légende aiglions contre blaireaux.  Le Poufsouffle pinçait des lèvres pour résister à la tentation de la rejoindre dans sa déferlante, en vain bien entendu. Et Wesley Jefferson se mit à pouffer, eu l’air mortifié un instant du dit pouffement féminin avant de reprendre de plus belle devant le ridicule de la situation. A se comporter comme des mômes parfaits  auxquels ils suffisaient juste de croiser le regard de l’autre pour perdre le peu de contenance qui restait.  Miroir mon beau miroir, dis moi qui a les  plus beaux cheveux ! Il inclina la tête légèrement sur le coté, ne sachant pas vraiment comment répondre à son compliment, Wes avait déjà du mal avec des commentaires en temps normal mais sur un corps qui n’était pas le sien ?

« Tu as pas de raison d’être jalouse ? Et puis, ils sont très bien tes cheveux, ils sont plutôt courts. »

C’était particulièrement laconique comme réponse et légèrement maladroit mais Wes n’avait jamais été très bon pour décrire les apparences physiques et « courts » était la seule chose qui lui était passé par la tête. Une étude plus approfondie du curieux spécimen Sloan version masculine lui aurait appris que malgré la luminosité la nouvelle crinière s’avérait un poil plus clair et s’amusait à défier la gravité tandis que le visage d’albâtre, plus anguleux était constellé de grains de beauté. Note pour plus tard, ne pas laisser Sherlock à portée de la moindre plume où il mettait sa main au feu qu’elle n’hésiterait pas à relier les nouvelles constellations à coup d’encre. Son nez se fronça aussitôt dans une légère grimace tandis que la justification à une requête des plus bizarres se révélait.

« Bond Girl, vraiment ? »

Quand à choisir, il préférait être M mais c’était une toute autre histoire. Si Sloan retrouvait son sarcasme c’était toujours bon signe.  Toujours une main nouée à Sir Holmes devenu officiel pilier de la soirée, Wes faisait de son mieux pour se débattre avec la sangle des objets de torture aussi connus sous le nom de talons. Deuxième grimace. Si l’enfer est pavé de bonnes intentions, la chambre des secrets devait être pavée de petits glaçons vu la température du marbre. Tout le monde ne pouvait pas se la jouer nymphe des bois en se promenant sans chaussures mais il allait devoir faire avec.  

« Tu sais, je crois que je viens de comprendre quelque chose… »

Deuxième peton aux orteils vernis au sol, terminé de jouer au flamant rose et le damoiseau devenu damoiselle offrait un sourire tout en reconnaissance là haut, encore plus haut sans les chaussures qu’il gardait bêtement à la main.

« En fait, si Cendrillon a abandonné sa chaussure c'est parce qu’elle avait peur de tomber et se casser la cheville ! »

Et maintenant, Sherlock?

Ils n’étaient pas très doués pour rester sérieux, d’ailleurs le rire de Wesley l’avait plus surprise que le sien. Elle pensait que ce serait rauque et bizarre, mais le plus drôle était la fluette et tendre gorge orientale. Et Wesley riait, l’amenant à le suivre, ça n’était pas mieux une fois la réflexion sur James Bond passée. Elle n’y pouvait rien, elle n’arrivait pas à se retenir. T. Holmes se souvient, des années avant lui avoir fait promettre sous la menace du placard de ne jamais avouer qu’ils passaient des après-midis à manger des sucreries et glousser comme des fous pris sur le vif à planquer les papiers dans leurs cachettes, solidaires. Quand elle y repense, après qu’il l’aie dépassé de taille, elle n’avait pas pu lui faire du chantage avec des placards, et elle était au courant qu’elle n’aurait jamais la bassesse de vraiment l’y laisser toute une nuit. Au pire, elle y allait avec lui et dans ce cas, ça n’était plus du chantage. La furibonde jeunesse.

Lui toujours si modeste et bercé de simplicité, elle qui se contente d’un petit battement innocent des paupières, de quoi le distraire pendant qu’elle ose jouer avec ses cheveux longs et parfaitement coiffés. Sloan elle embête la perfection.

La mécanique des corps la fascinait pourtant, réussir à ne sentir qu’une infime différence, sinon qu’on lui avait amélioré son champ de vision, elle en était d’ailleurs satisfaite, Sloan soutenait le poids-plume-Wesley, ce qui restait amusant, on était pas au bord d’un lac… mais presque. Les Weird’Sisters résonnaient dans les galeries, si bien que leurs voix camouflées rendaient un chant très sympathique à l’arrivée. Pendant que Watson retirait ses talons de super-déguisement-d’infiltration, lui vint à l’esprit que; ils avaient du tester la potion sur le groupe, histoire de voir si les voix étaient toujours aussi intéressantes. Quoique les gens ne se battaient pas pour rester sur la piste de danse.

« D’accord, d’accord Catwoman, si tu préfères. »

Les gens ou Sloan et Wesley. Docile pour des mains de garçon, elle attrape les chaussures du philippin et l’approche en le prenant par la taille. Peut être que d’ici ça paraît fragile. Et comme si ça allait se casser, avec un rictus destiné à une M refoulée, Sloan se tait et écoute. Elle est bavarde, d’ici quelques secondes elle lui répondra et ce sera un peu cynique, mais pas assez pour être méchant. Elle lui fera un des caprices des filles qu’on emmène à un bal par supplice, mais pas tout de suite. C’est Wesley. Alors elle s’y remet, à tourner, cette fois plus détendue pour ne pas repartir dans l’angoisse, se décale d’un pas, muette.

« Cendrillon elle a fichu un vent au prince parce qu’elle préfèrait les citrouilles au coup de foudre et je la comprends. A l’époque je veux dire. Mais oui elle avait définitivement pas envie de se faire une entorse uh. »

T’es sûre que t’as vu Cendrillon en entier Sloan.

« Dis Wes… Tu prévois toujours de postuler pour le préféctorat à la rentrée ? »

En temps normal, Wesley en train de faire une tentative de regard noir, ça aurait été juste comique mais avec sa nouvelle apparence, il avait juste l’air boudeur tout au plus en levant les yeux au plafond.

« Tu es horrible, j’espère que tu le sais. »

Wes ne prenait même pas la peine de questionner le comment du pourquoi Sloan en était venue à disposer de cette magnifique information. Le Poufsouffle s’était fait battre à plat de couture par une élève de gryffondor de première année, les sorts sur les vêtements c’était toujours les gryffondors bizarrement, il y avait peut être un trait de caractère proche de l’exhibitionnisme connu seulement du Choixpeau Magique surement. Mais ce n’était pas la défaite absolument cuisante le plus humiliant, non, parce qu’il avait fallu que le grand dadais se retrouve avec un fashionam bien carabiné en pleine figure. Wesley Jefferson, timide chronique en réhabilitation, s’était donc retrouvé dans un magnifique accoutrement tout en latex, le retour au dortoir avait été accompagné d’un cuisant sentiment d’embarras et de bruits de caoutchouc. Et même si Sloan disposait d’une information de chantage de premier ordre, ils savaient tout les deux qu’elle ne s’en servirait jamais vraiment par un accord tacite.

Comme souvent avec les serdaigles, Wes avait l’impression d’avoir raté une subtile nuance qui reliait de façon parfaitement logique la rentrée à venir avec une sombre histoire de citrouille. Un instant auparavant, il était supposé lui donner la réplique sur les hypothétiques avantages des légumes sur les êtres vivants, et la seconde d’après, Wes se faisait braquer ses chaussures et envisager le sujet avec une majuscule. Pris de court, il cligna rapidement, sa main partant une fois de plus à la recherche d’une mèche à triturer avant de se cacher derrière la nouvelle crinière.

« Oh. Euh. Je crois pas qu’on ait notre mot à dire, c’est  le professeur Mantis qui choisit, en fait. Mais j’aimerai beaucoup je crois. Enfin, je veux dire que c’est normal, Light et Elise sont super comme préfets donc c’est normal de vouloir faire pareil ? Et puis, il y a plein de monde qui le mérite alors… C’est pas grave. »

Pour le coup, Wes était bien content d’avoir rétréci, de cette manière, au lieu de croiser le regard plus haut, il pouvait se contenter de s’adresser à son menton, ou à la limite à sa cravate remise droite. C’était très bien, le menton, ça ne pouvait pas se moquer. Il avait tout de l’air coupable d’un enfant pris la main dans le sac.   C’est une caractéristique curieuse mais très répandue chez les gens n’ayant pas confiance en eux. Ils ont l’air gêné dès que l’on suggère qu’ils pourraient s’intéresser à quelque chose de convoité. Comme ils se sentent indignes de susciter l’attention, ils nient ne serait-ce qu’oser se mettre en avant ou vouloir quoi que ce soit. Même s’il faisait des efforts à ce sujet, cela restait toujours Wes, le garçon qui avait passé toute une après-midi à tirer à pile ou face pour savoir s’il devait se présenter aux essais de l’équipe de Quidditch de peur de ne pas être à la hauteur.

Bien conscient que la bleue voyait clair dans son jeu, il faisait de son mieux pour trouver une alternative à sa question, mais rien ne venait sinon cette histoire de macarnna. Welsey avait comme un sentiment de déjà-vu, ce qui était particulièrement bizarre vu que s’ils avaient déjà changé de corps dans la vénérable et ancestrale chambre des Secrets, le métisse était assez certain qu’il s’en souviendrait. Mais cette histoire de macarenna lui semblait franchement familière et avec un pouddlard express de retard la révélation.

« La macarenna et Emerald ! »

Si c’était une tentative de changement de sujet, c’était fumeux. Mais sa main s’accrochait à nouveau à l’élégant costume Holmesien pour attirer son attention avec tout le sérieux permis avec sa robe rose.

« Si ça se trouve, tout le monde a eu droit à ça et pas juste nous ! »

« Miss Mantis donc... »

Sloan avait ses informateurs. Certes elle ne le disait à personne et certes on le savait à quelques endroits malgré tout. Il lui arrivait de voir débarquer des premières années très dévouées, très indues de leur petite popularité en devenir et passablement bavardes. Holmes levait un sourcil et s’accordait pour écouter, ça ne demandait pas trop d’efforts, et on se sentait un peu priviligié. Autrement tout son talent hypothétique se résumait à un très bas niveau et elle n’était pas très douée. Forcément, elle aurait du se douter qu’à la place d’un bal carnivore à grandes péripéties, elle serait transformée en un homme, un garçon (si ça se trouve séduisant). Cela dit elle était distraite par les mimiques de Wesley et avouons-le, le superbe retour-image sur Catwesley ? Car au delà de toute l’humiliation d’une tenue en latex super-fashion, T. Holmes avait réussi à disparaître dans un creux de la foule, se tenant sa mâchoire tellement sérieuse, secouée d’un rire incontrôlable ce jour-là. Elle voulait aussi le siffler, rien que pour la classe, mais elle n’arrivait jamais à autant de sarcasmes empilés les uns sur les autres.

Se croyant dans un univers parallèle et encore en train de tenter de dévisager celle qui lui faisait face, Sloan laissa ses yeux retomber par terre et ses oreilles retrouver les Weird’Sisters, c’était drôle, mais c’était gênant de l’autre sens. Peut être qu’ils allaient rester comme ça longtemps. Elle pensait à des points sérieux, des enquêtes inutiles et lasses et mauvaises, des indices foireux, ratés, écrasés, trouvés trop tard. Elle avait oublié le nombre de semaines, de mois, depuis lesquels ils s’amusaient à ces douces et gentilles habitudes. Quand elle n’avait que quinze ans mais soudain assez de centimètres pour le regarder d’ici, le contempler, et le voir si enfant, non si jeune, si insouciant de tout, si modeste, si tout. Elle lui sourit, elle le sentit contre son costume maladroit, avec ses mains, ses doigts, son poids qui hésitait entre s’appuyer et se défaire, ou vouloir danser. Il n’y avait plus tant de choix que ça, mais ses paroles ne changeaient jamais, ne le grandissaient pas et ne l’abandonnaient pas à une normalité, non, il était simplement bon, dans le costume idéal pour exposer sa réalité à lui. Ce qu’elle pouvait être ignare à côté de Wesley Eugene Jefferson. Ah il était splendide pas vrai ?

« Tu as toutes tes chances... »

Le débit était lent, elle déposa les chaussures de sa main abaissée, elles touchèrent le sol qui ici n’était pas tant humide, penchant la tête de son spasme répétitif, Sloan écouta la diversion maligne du brun, brun bouclé, ce qu’elle pouvait se retenir d’étirer ses joues. Elle aimerait voir ce qu’il y avait de sarcastique sur sa nouvelle figure, ça l’aurait faite rire. Sans insister, juste pour son aise, sa petite délicatesse gratuite, elle se calme et oublie le lendemain, comme si ça n’existerait jamais. Après tout c’est ce que l’on était supposé vouloir, un soir comme ça.

« Ce n’est plus vraiment une hypothèse ça, Docteur Watson. Il a plu la misère sur nos têtes et tu es une naine. »

Doucement et sans trop espérer le surprendre elle agrippe sa patte toute crispée à elle, repliant le tissu sans aucune retenue, elle le tire par la main, elle l’emmène mais ne l’éloigne pas trop et parvient, avec l’écart minuscule à pouvoir lui parler des yeux avant de l’ouvrir et de regretter, bête.

« Si tu veux alors, on y retourne. »

Ca aurait été presque risible de voir à quel point, une toute petite phrase de rien du tout pouvait avoir de l’influence sur le poufsouffle. Il suffisait d’une phrase de rien du tout de Sloan pour que Wes arrête de triturer ses cheveux aussitôt, et à la place relève des yeux  presque reconnaissants vers en haut. C’était une vielle et même une sale manie qu’il avait toujours eu. Ce besoin d’approbation, de justification par autrui, de n’avoir la confirmation de quoique ce soit en se rabattant sur quelqu’un en face. Ronove le lui avait dit, tout le monde le lui répétait aussi et même le Jefferson en avait conscience. Alors au lieu de céder à la tentation d’un « Tu crois ? » facile, il se contenta d’un hochement de tête avec un début de fin sourire autant pour son alter-ego que pour lui-même.  

« Okay.»

Il replaça ses cheveux en arrière en partie pour se redonner une composture et ne pas afficher aussi clairement à quel point ses mots lui faisait plaisir. Il se sentait déjà plus assuré, plus tranquille aussi. Sloan avait toujours cet effet sur lui, elle ne lui disait jamais rien simplement pour lui faire plaisir ou pour le calmer. Elle savait. Sloan savait toujours ce genre de chose.  Malgré les piques innocentes et qu’il ne pouvait s’empêcher de remarquer qu’elle s’amusait beaucoup trop de l’échange de taille et faisait lui-même semblant de lever les yeux au ciel pour lui donner le change devant la logique Serdaigle s’il en était une.  Il ponctua sa question d’un simple hochement de tête avant de rebrousser chemin où la fête semblait battre son plein. Wes avait juste un très, très mauvais pressentiment. Un regard rapide pour scanner la foule en essayant de retrouver des visages familiers, même si forcément vu la pluie magique, ça allait être beaucoup plus compliqué de retrouver les autres. Plus de Light ou d’Alix sur la piste de danse et le garçon devenu demoiselle regrettait sa taille en ce moment, les avantages d’être une grande asperge. Hors de question de remonter sur ses chaussures néanmoins, alors il ne lui restait plus qu’à se hisser sur la pointe des pieds pour essayer de d’identifier les  individus dans la foule.  Le métisse connaissait trop bien son meilleur ami pour savoir que d’assister à un quelconque événement social, qui plus est un bal était déjà une épreuve pour ses nerfs, mais si en plus, il se faisait changer en princesse, ils étaient bon pour une crise de nerf de première ordre.  

« …. Sloan, dis moi que je rêve, c’est pas possible. »

Raidissement digne d’un Stupefix carabiné, une main solidement plaquée contre sa bouche, l’autre tirant une fois de plus sur la manche, il ne savait pas vraiment s’il devait hurler de rire ou d’horreur devant le spectacle fascinant qui se déroulait à quelques mètres de là. C’était haut la main la chose la plus perturbante que Wesley avait jamais vu de toute sa vie, et cela venait d’un garçon qui assistait à un cours donné par un tableauS’ils avaient plaisanté au sujet de voir leurs estimés professeurs potentiellement danser dans le but de convaincre Sloan du divertissement de premier ordre que représenterait la soirée, ce n’étaient que des affabulations et rien ne les préparaient à la vision d’un Viridus Emerald dans toute sa splendeur tout en froufrous.  Le croisement diabolique entre Candy et une meringue, et qui n’avait pas l’air très content selon ses gestes bien que son flot de paroles étaient rendu inaudibles ici, couverts par des accents plus aigus mais décidément toujours aussi survitaminés du groupe.   Wes, son émotion ravalée, s’hasarda à décoller sa main de sa bouche avant de lever un regard interrogatif à la drôle de sensation.

« Mince, ça colle… »

Même avec l’éclairage réduit des fées, il pouvait observer des résidus rouge sur ses doigts et porta à nouveau les doigts aux lèvres peintes.

Inclinant de deux centimètres sa tête sur la droite, Sloan répondit dans toute son assurance inexistante, celle qu’elle s’était convaincue de monter sur échasses pour la soirée. Elle lui redonna le bras, lui qui faisait gentiment disparaître sa reconnaissance, ils avançaient pour rejoindre ce qu’ils fuyaient au début. Elle faisait ses efforts à elle. Ce n’était pas toujours très concluant, parce qu’elle avait tendance, à peu près toutes les trois minutes à regretter son super T-Shirt collector qu’elle aurait pu montrer à Garfield sans culpabiliser pour Victoria qui n’était pas venue faute d’un cavalier.
Mais Sloan aurait pu refuser l’invitation au dernier moment dans la panique du moment fatidique à choisir entre Yoda et Kiho édition ultime.
Enfin elle s’était retenue pour Wesley, sans doute par jeunesse ou par confiance ou n’importe quelle autre débilité puérile qu’ils se vouaient l’un à l’autre, tels deux individus qui se connaissaient davantage encore et se trahissaient à se révéler capables de le faire par peur (oui le trahison ohlala). Sauf qu’il portait la robe (et il fallait lutter pour ne pas complimenter en tant que fille qui ne porte pas de robes). On se taisait dans les galeries. Ce qui passait, au-delà des tambours battants en rebondissant contre les parois, la musique, c’étaient les voix percées d’hilarité des autres, ce qui la rassura un peu, bien qu'elle ne sache pas de quoi devoir se rassurer. Ils passèrent la limite de là où ils n’existaient plus vraiment en tant que Wesley et Sloan. Et puis tout d’un coup si.

Elles convergèrent jusque Sloan qui passa un bras devant son champ de vision pour ne pas brûler vive, soutenant Wesley qui lui n’avait rien autre que ses orteils. Elle se retrouva dans une foule impressionnante et ne distinguait plus rien si ce n’était la boule à facette qui se lamentait dans la gueule immobile du reptile le plus terrifiant de toute la poudlarosphère. Tentait de mais c’était plus difficile que prévu, ça faisait plaisir de revenir au monde. Pour une fois, faute de s’enfermer dans le caveau égoïste du faux vampire exténué par sa misérable vie de cinq-cent-soixante-deux ans et vingt trois jours et quart, se retrouver au milieu d’un si joli spectacle. Elle ne put retenir le soulagement et laissa ses petits yeux se promener entre les spots lumineux qu’elle oubliait la demi-heure d’avant. Holmes avança, Eugene au bras, le sentiment de tout voir de très haut et de ne pas assez réfléchir à comment redescendre. Ça l’inquiéta une seconde, ensuite elle changea totalement de perspective.

« ...Non tu ne rêves pas. »

Tout ça pour une petite fille blonde, une blonde toute aussi criarde que les gens autour mais qui se distinguait par une voix moult décibels au dessus… Non. Emerald MOUHAHAHAHAHA ce soir était trop beau. Sloan revint sur la manche de son costume qui se faisait tirer. Elle dévoila ses dents, elle aurait presque eu le cœur à jalouser l’auteur du crime parfait, soudainement plus détendue, essayant de repérer des élèves parmi toutes les têtes rebootées au possible qui ne gardaient que quelques détails. C’était jouer à un qui-est-ce ? géant. Holmes s’appliqua à regarder ceux qui la regardaient et se contentait de répondre, niaise, totalement larguée, secouant une main avec tout l’amusement de sa montée d’adrénaline personnelle.
Ramenée dans la fougue du moment par la musique et l’ahurissement général, elle réussit à concentrer son attention sur le Wesley qu’elle n’avait pas vu d’aussi près depuis le jour où il s’était vu offrir un pack de verrues très amical. (A l'époque, ça la fascinait pour précision) Là où les triangles primaires couraient sur le visage de son acolyte qui dévisagea sa mimine d'asiatique, elle sortit le tissu parfait de sa poche, il était rouge carmin. La jeune fille haussa un sourcil, le garda à la main. Et défaite de tout sérieux, Sloan abandonna le classe mouchoir parfait, réalisa que quand bien même son maquillage demeurant impressionnant, elle approcherait ce pouce qu’elle n’arrivait pas à définir - le sien apparemment - du visage de son ami, détachant tout ce qui brillait de sa lèvre d’un geste hésitant avant de revenir à Viridus et… Là amenant son index à son éradiqueur de maquillage qu'elle appelait pouce, elle gloussa avec virilité.
C’est-à-dire pas du tout.