Carys essayait de se cacher tant bien que mal sous ses draps. Elle s'était réveillée ce matin en se sentant plutôt mal et le lendemain, elle s'était retrouvée avec de la fièvre, la peau grêleuse et le teint verdâtre. Un vrai zombie... On l'a placé en quarantaine dans l'infirmerie, puisqu'apparamment, sa maladie était très contagieuse. La "varicelle du dragon", il parait que ça s'appelle comme ça.

Autant Carys adorait les dragons de tout son coeur, autant, de mémoire, elle n'avait jamais voulu ressembler à un dragon. Hors maintenant, sa peau pouvait être associée à un Vert Gallois, quelle ironie du sort. Elle était affreuse comme ça. Elle refusait qu'on la voit. Elle n'avait prévenue personne qu'elle était malade, même si ça finirait par se savoir puisqu'elle était préfète. Elle toussa un peu. Absynthe lui apporta une potion, le fameux remède, mais elle était tout de même obligée de rester clouée au lit.

L'assistant tenta de faire de l'humour en racontant que trois siècle plus tôt, Carys serait déjà morte de cette maladie. Bénie soit Gunhilda de Gorsemoor. Son nom était revenue plusieurs fois dans des ouvrages sur les dragons qu'elle avait lu. Elle se redressa difficilement et avala le contenu du verre.

« Merci Monsieur. »

Au moins cette fois, elle n'était pas en danger de mort. Elle se rallongea, épuisée, et repassa à nouveau le drap sur sa tête. Affreuse.

Alors qu'elle se lamentait encore sur son physique à faire fuir tout le monde, Carys entend une voix qui l'appelle. C'est un garçon. Elle baisse à peine la couverture de sa tête pour voir d'où elle vient. Elle aperçoit une silhouette à travers le rideau qui sépare son lit d'un autre. Elle se met sur le flanc pour tenter de savoir qui c'est. Elle n'avait pas très bien reconnu le timbre, mais en se creusant un peu la tête, elle avait une supposition.

« ... Super Gryffy ? »

Ils avaient échangé tellement de MIP qu'elle connaissait sa voix par cœur à force. Oh non... Dire qu'il était là, juste à une petite poignée de mètres d'elle, alors qu'elle avait le teint vert et la peau presque écailleuse.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? Toi aussi tu as la varicelle du dragon ? »

Elle s’inquiéta un instant que ça soit elle qui lui ait refilé, mais c'était impossible, ils ne se sont jamais croisés de près.

Carys rit légèrement, un rire assez faible, qui se transforme en toux sèche ensuite. Elle ne se sentait pas très bien non, mais c'est vrai que savoir que Super Gryffy était à côté d'elle lui remontait un peu le moral.

« Oui, un peu. »

Elle se sentait toujours aussi mal et complexée par son état ceci dit. Elle ne voulait pas qu'il la voit comme ça. D'ailleurs, elle remonte rapidement la couverture sur elle quand elle voit sa silhouette se lever et approcher du rideau. Quand il parla d'un remède, elle l'abaissa à nouveau doucement.

Il lui tendait un petit bonbon. Elle aurait bien voulu le prendre, mais elle avait peur de le contaminer si elle le touchait. Elle tendit fébrilement la main en dessous de la sienne, veillant à ne pas le toucher.

« Tu peux le lâcher. Il ne faut pas que je te touche, sinon tu vas attraper la varicelle aussi. »

Elle sourit à travers le rideau.

« C'est gentil. Merci. »

Un bonbon au citron et au miel. Au moins, ça pourrait l'aider à soulager sa gorge. C'était une bonne chose. Elle défit l'emballage et fourra le petit bonbon dans sa bouche. Ça faisait du bien une friandise moldue et sucrée, c'était réconfortant. Elle soupira de contentement.

Puis elle faillit s'étouffer en entendant le nom de Romeo, avalant le bonbon d'un coup.

« R-Romeo ?! », s'exclama-t-elle d'une voix étouffée.

Mademoiselle Euphrasie l'entendit et s'inquiéta, passant à travers le rideau pour vérifier son état, mais Carys se leva et tira le rideau. C'était bien Romeo. Mais il y avait à peine quelques secondes, elle parlait à Super Gryffy ! Mais alors... Ils sont la même personne ? Alors ça veut dire que toutes les lettres... Elle les avait données à Romeo. Et tout ce qu'elle avait dit, c'était à Romeo aussi. Toute son admiration, ses sentiments...

Elle eut mal à la tête et chancela, tombant par terre.

Le choc et la varicelle du dragon n'allaient pas bien ensemble.

Carys se sentit soulevée puis replacée dans son lit, sa toux empirant un peu plus. Elle n'arrive pas à ouvrir les yeux, elle ne supportait pas très bien la lumière et ça lui donnerait encore plus mal à la tête. Mademoiselle Euphrasie fit voler un flacon jusqu'à elle pour qu'elle le boive, ce qu'elle fit avec un peu de mal, heureusement qu'il était déjà débouché.

Le liquide calma tout de suite sa gorge en feu, c'était froid, glacé même, mais les picotements désagréables qui la brûlait se calmèrent instantanément. Elle se rallongea ensuite en tâchant de reprendre son souffle, sa fièvre commençant à se faire moins sentir également.

Carys regarda Romeo à travers ses paupières à moitié fermées. Elle avait envie de se couvrir à nouveau la tête avec son drap mais avait trop chaud et besoin d'air pour ça. A sa place, elle se tourna de l'autre côté pour qu'il ne voit pas son visage. Elle était horrible et avait honte. Et oui, un peu trahie aussi.

« Tu n'aurais pas du me toucher. Tu vas être malade aussi. »

Elle toussa encore un peu et remonta sa couverture jusqu'au nez, toujours en lui tournant le dos.

« Pourquoi tu ne m'as rien dis ? Pourquoi tu m'as laissé croire que tu n'étais pas la même personne ? »

Dire que cette mascarade avait duré plusieurs mois ! Elle se sentait idiote.

Elle crispa ses doigts sur sa couverture sur elle quand Romeo dit être fort. Certes, il guérirait sans doute rapidement, mais la dragoncelle restait la dragoncelle, une maladie pénible qui enlaidit. D'ailleurs elle ne voulait pas que Su- que Romeo la voit dans cet état. Faible. Et hideuse. Et en plus, elle l'avait probablement contaminée. C'était nul pour une première rencontre... une fausse première rencontre avec son héro.

Est-ce que c'était vrai ? Est-ce qu'elle était plus heureuse en parlant à Super Gryffy qu'à Romeo ? Oui, assurément. Romeo était un élève parmi tant d'autres pour elle jusque là, sympathique, mais pas spécial, contrairement au héros masqué. C'était stupide, elle se sentait comme une gamine qui venait de découvrir que chaque année le gros bonhomme rouge et barbu qu'elle voyait était son père déguisé, et non le Père Noël.

« Tu aurais du me le dire quand même. Si j'avais su... »

Elle ne savait pas quoi rajouter. Elle ne savait pas ce qui se serait passé. Elle n'aurait pas été particulièrement déçue ou trahis, non. Pas comme maintenant.

Carys l'écouta attentivement. Elle aurait aimé pouvoir lui dire qu'elle n'était pas déçue, mais ça serait faux. C'était un peu le cas. Elle avait confié tellement de chose à Super Gryffy, sans se douter une seule fois que c'était Romeo en réalité.

Mais elle peut entendre dans sa voix qu'il est sincèrement désolé. Elle aussi l'était, ce n'est pas comme si elle allait se mettre à le détester pour ça quand même. Il lui faudra juste un peu de temps pour s'y habituer. Elle se mit à rougir aussi fort qu'elle le put à travers son teint verdâtre et s'enfonça sous sa couverture.

« Dire que j'ai écris toutes ces lettres et que je te les passais en pensant que... Raaah ! C'est si humiliant ! »

Elle lui avait écrit une lettre d'amour bon sang ! Même si ça remontait en début d'année...! Et elle était tellement gênée de l'avoir donné ! Elle savait qu'elle aurait du la jeter dans le feu tant qu'il en était encore temps !

Adorable n'était pas le mot. Humiliant, oui. Elle ne savait pas très bien ce qui lui était passé par la tête, au fond, pour elle, Super Gryffy n'avait jamais vraiment été un élève, vraiment un genre de personnage mystique dont elle ne saurait jamais l'identité. Alors qu'elle l'avait sous le nez depuis le début.

Mais elle pouvait comprendre l'intention de Romeo. Oui, elle ne se serait jamais confié à lui comme elle s'est confiée à Super Gryffy. C'était parti d'une bonne intention...

« Je comprends. Je crois. »

Elle sortit la tête de la couverture, mais lui tournait toujours le dos.

« Pardon, je ne t'en veux pas. Je suis juste choquée, je ne m'y attendais pas. »

Il était clair que ça pouvait jeter un froid. Mais au fond, ils restaient la même personne, ses paroles étaient les siennes et ses conseils aussi.