Les sages paroles du prince ne pouvaient que le renvoyer à leur première rencontre, lorsque ledit ambassadeur avait quelque peu pollué le bureau du Ministre -avec son aide, qu'il essai de se distancer de l'acte ou non, mais il était sûr que les moldus, eux, n'obligeais pas autrui à participer à la pollution casuelle des lacs. En tout cas, ce n'était écrit dans aucun des nombreux livres qu'il avait dévoré sur le sujet.  Le vrai conseil que Jaromir voyait de suite, était de probablement ne pas se rendre à la fête de Poudlard avec un tel individu, mais le jour où il oserait partager cette révélation était encore loin d'arriver. Même l'énergie du désespoir ne réussirait pas à lui faire affronter sa mère: pour ce qui était de jouer les larbins le sept juillet, il était aussi cuit que le délicieux repas qu'il se forcerait à partager avec sa Majesté alors que son estomac avait fuit à l'instant où la lettre lui avait été fourrée entre les mains.

- Je lui demanderais- enfin, j'y penserais.

Le sorcier se sentait mal à l'aise rien que de s'imaginer poser la question à mademoiselle Solomon. Pas qu'il se soit souvent senti à l'aise en parlant à des femmes, mais ce serait probablement pire en déblatérant ce genre de discours sortit de nulle part. Il n'y avait juste aucune façon d'aborder quelqu'un sur le sujet sans avoir l'air au mieux ridicule, au pire carrément bizarre. Déjà qu'il savait ses chances avec l'inventrice très minces, voir inexistantes -voir même, à bien y réfléchir, totalement fantasmée par une partie de son esprit, alors que la plus rationnelle continuait d'être incapable de l'imaginer autrement qu'en bonne amie-, alors s'il commençait à suivre le guide de la parade nuptiale selon Solus, il était sûr de ne plus jamais la revoir.

Sa vie sentimentale était définitivement déjà assez compliquée sans que son Altesse ne vienne y mettre ses pieds palmés.

- Enfin, mieux vaut partisane de la pensée moldue que moldue, pas vrai ?

… Probablement ?

Ce n'était pas le moment de laisser les idées d'April s'insinuer dans son esprit et de lui faire reconsidérer ses moindres faits et paroles vis-à-vis des moldus, pas devant sa Majesté, encore moins alors que sa mère risquait de revenir d'un instant à l'autre. Mais c'était bien vrai, et s'il s'entichait d'une moldue, et qu'ils allaient pique-niquer , et qu'elle jetait vraiment ses déchets dans le lac ? Il était à peu près sûr d'avoir déjà vu des élèves de Poudlard laisser traîner leurs emballages de dragée surprise sur la voie publique, mais ça ne se comparait sans aucun doute à laisser n'importe quelle invention moldue pleines de composants dangereux dans le lieu de vie d'autres êtres doués de conscience !

- Pardonnez mon indiscrétion, mais, hum… A propos de cette fête. Bafouilla-t-il en levant la lettre, espérant chasser ces visions apocalyptiques des femmes moldues de son esprit et s'éloigner le plus possible du sujet. Vous n'avez pas de … D'ambassadrice, à y emmener ?

De princesse ? Compagne ? 'femelle' ? Jaromir n'avait aucune idée du terme approprié pour parler de l'hypothétique créature qui pouvait tourner autour de son Altesse. Son sang bleu laissait penser qu'il devait bien y avoir des soupirantes, au moins une, et ce malgré son caractère… Particulier, pour rester poli. Et encore ! De son expérience -ou plutôt, de par ses observations- à Durmstrang, être vile, mal intentionné, brutal et généralement peu malin plaisait beaucoup aux filles -en tout cas à celle de l'Est. Même toute la théorie du monde ne pouvait résoudre ce mystère et expliquer pourquoi, mais il savait que si une chose se produisait assez de foi, ça devenait une vérité en elle-même.

- Je veux dire, pourquoi moi ?

La boucle s'était bouclée sans qu'il ne se rende compte, et à vrai dire, il n'était pas si sûr de vouloir entendre la réponse à la question, alors qu'elle ne cessait de flotter dans sa tête à chaque fois que sa Majesté faisait partie de l'équation.

L'âge de l'ambassadeur remettait soudainement en perspective ses malheureuses trente-et-une pitoyables années de vie, et lui rappelait surtout que la personne qui faisait les cents pas dans son salon n'appartenait pas au même monde que lui -un euphémisme pour simplement dire qu'il s'agissait d'une créature et que, aussi stupide que cela puisse paraître alors que l'être poisseux semblaient décidé à recouvrir d'eau le moindre centimètre cube de la maison, ce que les sorciers n'avaient pas tendance à faire, Jaromir avait tendance à oublier ce détail. Pas que ça ne soit pas évident, mais il réalisait -à croire que l'accumulation d'événements catastrophiques réveillait sa matière grise- que sa peur de sa Majesté n'avait jamais été particulièrement liée à son statut de sang. Là où il fuyait tout ce qui s'éloignait de près ou de loin d'un humain, Solus, qui inspirait la plus grande anxiété et le plus terrible désespoir au fond de son être, le faisait aisément par ses actions et son statut politique, sans avoir recourt aux légendes et mythes plus ou moins avérés sur les êtres de l'eau. A tel point que oui, Jaromir arrivait à oublier que le Prince et lui n'étaient pas juste loin d'être des semblables de par leur place dans la hiérarchie, mais aussi par le sang lui-même.

Tout ça, alors qu'il le savait très bien Ambassadeur, et pas Ambassadeur de n'importe quoi, ce qui rendait l'omission quelque peu ridicule.

Ce qui le consolait un peu, en revanche, était de savoir que s'il n'avait pas accompli beaucoup jusque-là, il se considérait au moins comme un adulte plus ou moins accompli -s'il essayait de ne pas penser au fait qu'il vivait encore dans le nid familial-. C'était tout ça de pris en plus sur sa Majesté, mais il eut le bon goût de garder cette petite satisfaction pour lui, bien vite ramené à la réalité par la soudaine demande de discrétion qui le fit presque sursauter. Et il n'eut même pas le temps de dire qu'il n'y aurait même pas pensé -alors qu'en réalité, si, mais sans autres intentions que se 'vanter' d'être un adulte 'accompli' trois fois plus tôt que son Éminence à sa mère, tout bas pour être sûr que cela ne tombe dans l'oreille du goblin qui lui servait de sœur et qui ne se priverait pas de remettre en doute ses soi-disant accomplissements-, déjà agressé par le doigt accusateur de l'Ambassadeur. Une seconde alors, juste une, Jaromir se demanda si les être de l'eau pouvaient lire dans les pensées, et son pauvre cœur n'y aurait pas survécu si le Prince avait confirmé ses doutes. Par contre, son soupir de soulagement pouvait être mal interprété, et il regretta de l'avoir poussé à la seconde où il le réalisa.

- Tout à fait, oui,  bien sûr, a-absolument- bafouilla-t-il, en espérant que cela suffise à faire oublier son soupir comme s'il s'agissait d'une faute impardonnable, tout en se ratatinant au maximum dans son siège. Il devait définitivement investir dans une de ces capes d'invisibilités, sa vie deviendrait tellement plus facile !

Et tout son désespoir lui retomba instantanément sur les épaules, rendant sa fusion avec le canapé encore plus aisée. Ha, ça lui apprendrait bien a être serviable, et surtout à ne pas vouloir perdre son boulot -quand bien-même être serviable aurait pu lui faire perdre son boulot, en quel cas il devait blâmer son incapacité à voir les ennuis arrivés.

- C'est… C'est trop aimable.

Si Jaromir était d'un naturel peu convaincant dès qu'il fallait faire autre chose qu'énoncer des connaissances académiques, il gagnait des sommets ces derniers jours -que ce soit pour rassurer sa mère et lui dire que tout allait bien alors qu'il se trouvait au bord des larmes à la simple évocation du tournois ou prétendre trouver les dernières inventions tombées sur son bureau ingénieuse, même si dans le second cas, il n'y avait pas réellement mis de cœur depuis son arrivée au Bureau des Brevets Saugrenus.

- Donc cette, hm, fête, ça fait partie de cette mission ?

Ça ne risquait pas de contribuer à faire tomber la pression. Il se savait pas entièrement incompétent, et loin d'être gaffeur quoi qu'en dise les restes de sucre glace fondu dans le tapis, mais si pour une raison ou un autre sa présence mettait en péril l'accomplissement de l'Ambassadeur, il était sûr de finir noyé dans le lac, que ce soit tiré par le Prince Solus lui-même ou par sa propre culpabilité. D'accord, s'il souhaitait parfois que sa Majesté ait un tragique incident lors de l'une de ses escapades hors de l'eau, il y avait une nuance avec le fait d'activement participer à ruiner sa vie -et puis, ces premières pensées finissaient toujours pas le mortifier du simple fait qu'elles lui aient traversé l'esprit.

- Les algues aussi ? C'est…

Une façon originale d'essayer de garantir le respect des droits de son peuple ? Une manœuvre bancale ? Une coutume ? Si ça lui paraissait déjà louche au moment de le faire, lier ça avec un but d'une telle gravité ne faisait qu'épaissir le mystère.